Municipales : une référence féconde, la subsidiarité

Les débats en vue des prochaines élections municipales mettent en jeu la politique comme exercice du pouvoir, mais aussi comme organisation de la cité au plus près de la vie des gens.

Pour en éclairer les enjeux, il vaut la peine de raviver un terme un peu abscons : la subsidiarité. Ce principe, promu par l’enseignement social de l’Église, est aussi évoqué dans des textes officiels, notamment dans l’organisation des rapports entre l’Union européenne et les États membres. Pour mesurer la fécondité de cette référence, il importe de la situer en lien étroit avec deux principes fondamentaux de l’éthique sociale : la dignité humaine et le bien commun. C’est ce que fait le pape François dans Laudato si’ : « Le bien commun présuppose le respect de la personne humaine comme telle, avec des droits fondamentaux et inaliénables ordonnés à son développement intégral. Le bien commun exige aussi le bien-être social et le développement des divers groupes intermédiaires, selon le principe de subsidiarité » (n° 157).

Le rôle positif des différents niveaux politiques et des corps intermédiaires

Dans le cadre de l’enseignement social de l’Église, la subsidiarité a été promue par Pie XI, en rapport avec la montée des totalitarismes (Quadragesimo anno, 1931, n° 88). Il s’agit d’abord de considérer positivement la responsabilité propre des différents échelons politiques, au lieu de concentrer le maximum de pouvoir au sommet de la pyramide. D’autre part, en plus de la vie économique qui bénéficie d’une large autonomie, le recours à la subsidiarité favorise l’initiative et l’action des différents corps intermédiaires (associations, syndicats, religions…) qui manifestent la vitalité du corps social : toute impulsion positive ne vient pas forcément d’en-haut !

Dignité humaine

Quelles sont les bonnes raisons de promouvoir de telles pratiques ? Il y a tout d’abord un enjeu de dignité humaine. Au nom de celle-ci, chaque personne doit pouvoir accéder à une part convenable du bien commun, afin d’avoir une vie correcte ; les situations de pauvreté dans notre pays et à l’échelle du monde rappellent que nous sommes loin du compte ! Mais la dignité comprend aussi la capacité pour chacun de participer positivement à la vie commune en y apportant sa compétence et sa créativité propres ; une société qui rejette et exclut, au point de considérer certains de ses membres comme des déchets, est, là encore, loin du compte ! Le respect de toute personne humaine comprend à la fois le droit d’accéder aux biens élémentaires et la possibilité effective de prendre une part active dans l’organisation de la vie commune. Pour assurer le déploiement de cette dignité fondée sur les droits de l’homme, il faut demeurer vigilant quand certains évoquent avec mépris un soi-disant « droit-de-l’hommisme » !

Bien commun

La mise en œuvre de la subsidiarité promeut une vie commune féconde. Selon une vue tronquée du bien commun, on confond l’efficacité politique avec l’emprise d’un collectif géré par un pouvoir central, au détriment des contributions libres et créatrices des citoyens. Ceux-ci méritent d’être reconnus comme acteurs de la vie commune, tant dans leurs initiatives individuelles que dans l’animation des corps intermédiaires. Une vue biaisée de l’autorité peut altérer gravement la qualité de la vie commune ; à l’inverse, la démocratie participative, qui ne réduit pas les corps intermédiaires à de simples contre-pouvoirs, peut contribuer à une solidarité fraternelle.

Les élections et l’engagement quotidien

Le vote, notamment à l’échelon municipal, représente un acte démocratique majeur. La démocratie, en respectant le choix du citoyen, reconnait ainsi sa dignité. Il faut cependant veiller à ce que les élus ne prétendent pas faire le bien du peuple sans lui, voire contre lui ! De plus, la vie démocratique ne se réduit pas au seul acte électoral. La participation continue à la vie de la cité – de manière créative et engagée, notamment dans les activités bénévoles – constitue un bien précieux pour la collectivité et chacun de ses membres. Au moment de voter, les engagements des candidats concernant la prise en compte des différents échelons de pouvoir et la reconnaissance effective des corps intermédiaires seront de précieux indices pour un choix éclairé. Mais chaque citoyen peut également s’interroger sur la manière dont il met en œuvre la subsidiarité dans les différents lieux où il exerce un pouvoir : au travail, dans les associations, etc.