Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

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Ce petit livre est la reprise d’une conférence qui s’attache à mettre en évidence la fécondité culturelle du christianisme en philosophie. L’auteur se réfère à ses domaines de compétence : la tradition grecque et la pensée chinoise.

À la différence d’une opinion qui joue l’évitement à l’égard du religieux et tout particulièrement du christianisme, il considère celui-ci comme une ressource offerte à tous, à condition qu’on cherche à la faire fructifier. Et, pour cela, il importe d’en discerner la sève profonde, au lieu d’en rester à des caricatures ressassées. Cependant, F. Jullien précise, dès la quatrième de couverture, qu’il s’intéresse aux ressources du christianisme, mais « sans y entrer par la foi » et, il affirme se tenir « dans l’en-deçà de la Résurrection » (p. 70). Le statut épistémologique de son propos est donc clair.

Il opère aussi un choix dans le corpus du Nouveau Testament en retenant l’évangile de Jean. Il note que, dès le prologue, l’accent est mis sur l’événement, le surgissement : de l’inédit est possible sous le mode de la promesse d’une Vie en plénitude. Ce qui n’a rien à voir avec un « développement personnel » qui n’est « qu’hygiène et spiritualité à bon marché » (p. 59). La Vie dont il s’agit n’est pas un simple élan vital, elle procède d’un écart qui se dit en Jean par la « dé-coïncidence » de Dieu avec lui-même pour entrer en relation (p. 73). Et la vérité dont il est question en Jean n’est pas une vérité spéculative, mais une vérité qui fait vivre, ce qui suppose un sujet qui s’y engage. Cette Vie s’accomplit dans un amour agapè qui va jusqu’au don total.

Ce travail documenté de F. Jullien permet d’évoquer de nombreuses recherches actuelles qui s’intéressent de près aux apports de la tradition chrétienne à la culture, tout en précisant que leur démarche se situe hors d’une adhésion de foi. Voilà un espace de rencontre et d’échange, de stimulation réciproque, qui appelle l’attention et le travail des croyants.

À partir d’une expérience ecclésiale, notamment dans le cadre de Justice et Paix, on peut ouvrir le questionnement. La mise à l’écart de la question de Dieu et de la Résurrection ne risque-t-elle pas de recentrer l’individu sur sa quête personnelle dans l’instant présent, au détriment d’une responsabilité sociale qui s’inscrit dans une histoire et qui, plus que jamais, doit s’ouvrir à l’avenir ? Pour les chrétiens, faire mémoire de Jésus Christ implique la reconnaissance de sa présence actuelle comme un facteur d’espérance ; celle-ci prenant corps en des engagements concrets et communs au service des plus pauvres et des générations à venir.

La « crise » migratoire en Europe se noue entre chancelleries, partis politiques, organisations internationales et ONG, par médias interposés. Les universitaires ne sont pas en reste : ils lancent régulièrement études, tribunes et chiffres, dans un maelstrom d’informations et de décisions contradictoires.

Derrière ces batailles de données, il faut voir des luttes d’influence. En effet, qui définit la réalité se positionne pour en décider. Questionnons donc quelques données, ce qu’elles disent (ou non) de la réalité, mais aussi de ceux qui les énoncent. Chacun exhibe ses chiffres et, pour les journalistes, les chercheurs ou les hommes politiques sérieux, leurs sources. Ces dernières, les plus indiscutables possibles (INSEE, Eurostat), sont largement institutionnelles. Les chercheurs dépendent d’organismes comme le HCR (Haut Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés), l’OIM (Organisation Internationale pour les Migrations) ou encore FRONTEX (Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes). Ils ont appris à scruter et à croiser leurs données pour produire du sens. Cependant, certaines deviennent des objets, voire des bombes, politiques : la donnée technique se transforme alors en projectile qui, dans sa trajectoire médiatique, perd sa méthodologie, sa définition et son contexte d’émergence.

Chaque chiffre, un agrégat : premier exemple

Prenons un premier exemple, récent : L’OFPRA a annoncé que la France avait reçu plus de 100.000 demandes d’asile en 2017, un cap « historique », selon l’agence elle-même et plusieurs médias. Pourtant cette « barre » ne signifie rien de particulier. La croissance du nombre de demandes est, en effet, régulière depuis plusieurs années et correspond, mis à part le cas spécifique des Albanais, à des personnes fuyant les crises du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Haïti.

Ce chiffre inclut les premières demandes, les réexamens, les réouvertures de dossiers clos et chaque mineur accompagnant un demandeur d’asile. Les premières demandes seules représentent 73.000 cas, chiffre record qui, selon l’OFPRA, n’inclut pas, en principe, les « dublinés »[1], qui ne peuvent déposer une demande d’asile en France. Toutefois, dans une étude comparée des chiffres de l’OFPRA et du Ministère de l’Intérieur, la Cimade, elle, affirme que le chiffre de l’OFPRA inclut plus de 16.000 « dublinés requalifiés », qui ont pu intégrer la procédure d’asile (normale ou accélérée).

Sur le fond, ce « record » ne peut s’apprécier sans prendre en compte le taux global de reconnaissance des réfugiés (36 % en 2017 en baisse de 2 %) ni, surtout, la part croissante de la protection subsidiaire[2]. En 10 ans, elle est passée de 8 % à 42 % des protections accordées par l’OFPRA. Le statut de ces protégés subsidiaires reste fragile, et leurs droits sont plus limités que ceux des réfugiés : par exemple, le principe d’unité de la famille ne s’applique plus à eux depuis 2008. Beaucoup font appel pour obtenir le statut de réfugiés et sortir de ces limbes juridico-administratives. La qualité de la protection française s’est donc fragilisée posant la question de l’intégration.

Enfin, ces données brutes, non rapportées à la population, ne permettent, ni d’appréhender l’effet de ces arrivées sur la société, ni de nous comparer avec nos voisins européens.

La confusion qui règne autour de la question des dublinés met en évidence l’impact de changements politiques ou méthodologiques sur les données chiffrées. Ces changements sont en général renseignés par les chercheurs, plus rarement par les médias, quasiment jamais par les acteurs politiques. Ils sont pourtant essentiels pour comparer et interpréter l’évolution des courbes. Par exemple, l’enregistrement à titre personnel des enfants mineurs accompagnant les demandeurs d’asile, commence en 2002. Ou encore, l’OFPRA compte les enfants mineurs des réfugiés, devenus majeurs, dans l’estimation des personnes sous sa protection, depuis 2009. En même temps, l’agence reconnaît qu’il est difficile d’estimer exactement le nombre de personnes qui sortent chaque année de son giron. Comme pour les dublinés, il y a des zones de flou. Les données restent des estimations qui, parfois, en disent autant sur l’agence que sur les migrants.

Car il est important de souligner les enjeux qui sous-tendent les discours de l’OFPRA. Responsable de l’examen des demandes d’asile, l’agence doit se montrer à la hauteur du défi et justifier du bon usage des ressources allouées. Son directeur, Patrice Brice, en souligne l’efficience : 115.000 dossiers traités en 2017 (plus 30%) et dans le même temps réduction du nombre de cas en instance, insistant sur la capacité de l’organisation à accélérer les procédures, comme l’exige le gouvernement. Ce qui se joue dans ce chiffre historique, c’est donc aussi une posture institutionnelle. Dans des sociétés qui se veulent scientifiques, produire du chiffre reste une dimension clé de la crédibilité. Produire des données précises sur les migrations, c’est, pour l’OFPRA, FRONTEX ou le HCR, aller au-delà de l’illustration et montrer que l’on connaît bien la réalité dont on est chargé, à défaut de la contrôler.

La danse des chiffres, des comparaisons et des évolutions : deuxième exemple

 Un chiffre seul parle relativement peu. Alors on le compare à d’autres, on parle évolutions, on dessine des courbes et, surtout, depuis quelques années, on produit de l’infographie. Examinons donc un deuxième « record », les 68,5 millions de migrants forcés annoncés par le HCR en 2018 :

Comme le montre le schéma ci-dessus, ce chiffre est également un agrégat. Il inclut réfugiés, demandeurs d’asile, et surtout personnes déplacées internes. À l’aide d’autres graphiques, le HCR insiste sur l’origine et la répartition spatiale inégale de ces personnes. Enfin, pour aider le lecteur à mieux percevoir le drame de la situation, on précise que 44.000 nouvelles personnes fuient chaque jour conflits et persécution.

L’infographie met en épingle quelques chiffres pour marquer les esprits. Cet outil de visualisation, de comparaison, pédagogique, est surtout politique. Là encore, il est nécessaire de questionner ces données et leur présentation. Comme dans le cas des 100.000 demandes d’asile de l’OFPRA, les chiffres sont absolus et non relatifs (comparés à la population mondiale ou à celle de pays). Or, François Héran le souligne très justement, toute comparaison sur l’accueil des migrants requiert un travail sur des chiffres rapportés aux populations : l’impact socio-économique d’un million de réfugiés syriens n’est pas le même au Liban, en Turquie ou en Allemagne. Dans le contexte européen, la France a été le deuxième pays en matière de dépôt de demandes d’asile en 2015 et 2016, loin derrière l’Allemagne. Mais rapporté à sa population, la France tombe à la 16e place, en deçà de la moyenne européenne.

En outre, il est important de revenir aux chiffres-mêmes. Par exemple, il est généralement accepté que le nombre de personnes déplacées internes n’a cessé d’augmenter depuis 20 ans, et particulièrement ces dernières années au Moyen-Orient. Mais il est difficile de s’avancer sur des évolutions à plus long terme. En effet, le premier recensement mondial du nombre de déplacés ne date que de 1998. Qu’en était-il dans les années 1950 et 1960, à l’époque de la décolonisation, de la guerre d’Indochine, du Vietnam, de l’apartheid, etc. ? Faisait-on la différence entre fuite pour cause de persécution, catastrophe environnementale, exode rural ? Peu de données étant accessibles, les graphiques sur le long terme ont des bases scientifiques fragiles.

Précisons encore : les premières estimations globales du nombre de déplacés dans le monde ne prenaient pas en compte les victimes de désastres environnementaux, sauf s’ils étaient combinés à une persécution étatique. Aujourd’hui les approches ont changé. Pour 2017, l’Internal Displacement Monitoring Centre (IDMC) estime à plus de 18 millions le nombre de personnes nouvellement déplacées par des catastrophes environnementales, dont presque 4,5 millions en Chine et plus de 3 millions aux Philippines. Enfin, se pose toujours la question de la sortie des personnes des statistiques (la fin du déplacement). L’IDMC reste flou sur le sujet et semble dépendre de données fournies par les gouvernements et le HCR. Or les critères de définition d’une fin de statut de déplacé interne varient arbitrairement selon les pays et le HCR reste également peu clair sur le sujet. De fait, des pans entiers des compilations globales sont fragiles ce qui n’empêche pas des chiffres « records » d’être publiés.

 Conclusion : la métaphore du liquide

 Les chercheurs plaident pour un usage non politicien des nombres, afin de mieux comprendre, répondre, voire anticiper, les crises migratoires. Les exemples ci-dessus incitent à la prudence.

Mais les scientifiques, s’ils maîtrisent les statistiques, sont parfois piégés par … les mots. Car les discours migratoires ne reposent pas seulement sur des données. L’anthropologue David Turton a souligné que le langage dominant des migrations se construit sur une métaphore puissante touchant l’ensemble de la production politique et scientifique : la métaphore du liquide. Ne parle-t-on pas toujours de vagues de réfugiés, de capacités d’accueil, de trop-plein ? Même François Héran, dans sa leçon inaugurale au Collège de France, a distingué la déferlante migratoire de ces dernières années d’une lame de fond que prépareraient éventuellement des évolutions démographiques. Or, cette métaphore induit une naturalisation du phénomène migratoire. Tout devient masse, phénomène naturel (voire catastrophe naturelle). Centrés sur les questions d’étanchéité, de maîtrise des flux, on en oublie que plus de 95 % des populations du monde choisissent de vivre dans leur pays (ce que F. Héran rappelle). Mais on oublie surtout que les migrations sont affaires de décisions personnelles et familiales ; qu’elles sont faites de multiples trajectoires, chacune unique ; enfin que l’accueil est une responsabilité qui se pose à chacun, chacune. En tant que personne humaine, voisin, prochain.

[1] « Dublinés » : selon le « règlement Dublin III » (26 juin 2013), les demandeurs d’asile doivent déposer leur dossier dans le premier pays européen où ils sont entrés.

 

[2] Depuis 2003, elle est accordée pour un an (renouvelable) à des personnes qui ne rempliraient pas les conditions de l’asile mais néanmoins ne pourraient être renvoyées dans leur pays, souvent pour cause de guerre.

Fin 2018, le climat revient sur le devant de la scène. Deux raisons à cela : les vagues de chaleur dans l’hémisphère nord et la COP24 (24e Conference Of Parties), qui aura lieu les 2-14 décembre, à Katowice (Pologne).

 

La Conférence des Parties (COP) a été instituée par l’art. 7 de la Convention Cadre des Nations Unies pour le Changement climatique (CCNUCC), convention suscitée par le GIEC[1], adoptée au Sommet de la Terre à Rio de Janeiro (signée à New York) en 1992, entrée en vigueur le 21 mars 1994. Dans l’intérêt des générations actuelles et futures, son objectif est de « stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique » (art. 2). Sont prônés la sécurité alimentaire, le développement durable, l’éradication de la pauvreté, l’équité en fonction des responsabilités communes mais différenciées, des besoins spécifiques et des capacités respectives entre pays (développés / en développement, particulièrement ceux vulnérables aux effets néfastes des changements climatiques et/ou les moins avancés).

La COP21, en 2015, a abouti à l’Accord de Paris, premier accord universel sur le climat, approuvé par 195 États et l’Union européenne (UE), signé par 174 États et l’UE en 2016, entré en vigueur le 4 novembre 2016 (ratifié par les 55 pays requis – dont les États-Unis – représentant 55% des émissions mondiales). Élu le 8 novembre 2016, Donald Trump a annoncé, le 1er juin 2017, le retrait de son pays (pas avant le 4 novembre 2020 : art. 28).

La COP24 viendra en point d’orgue de quelques événements de l’automne. Suscitant des milliers de manifestations dans le monde (150.000 personnes en France), le Sommet de San Francisco (12-14 septembre) a regroupé les « we’re still in » : des États, villes et entreprises américaines décidés à respecter l’Accord de Paris. Un rapport du GIEC a été publié le 8 octobre.

L’économie de la Pologne, laquelle va présider la COP24, est très liée à la production de charbon, source d’énergie la plus émissive en gaz à effet de serre[2]. L’Église polonaise est peu mobilisée. Des responsables polonais de la COP ont été invités à la Conférence Laudato Si’ en juillet 2018 au Vatican : ils ont pu constater la mobilisation de catholiques du monde entier.

Premier enjeu : adopter des « règles du jeu »

Un « manuel » doit rendre opérationnel l’Accord de Paris (date butoir : fin 2018) : rendre robustes les contributions individuelles des pays, permettre leur révision à la hausse tous les cinq ans à travers un bilan mondial, et rendre les États redevables de leurs actions, en créant des règles de transparence claires. Les pays élaborent ce « manuel » depuis deux ans.

Des organisations de la société civile demandent de rendre opérationnels les objectifs de défense de droits de l’homme, inscrits au préambule de l’Accord de Paris[3].

Deuxième enjeu : deux outils financiers

La promesse de mobiliser 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 (COP15, Copenhague, 2009). Le même effort est prévu jusqu’en 2025, suivi d’une montée en puissance. Ces financements sont bilatéraux (via l’Agence Française de Développement pour la France), ou via la Banque Mondiale ou le Fonds vert pour le climat. Il y a là un enjeu de justice et de solidarité : les pays historiquement (et actuellement) les plus émetteurs favorisent des investissements dans les pays en développement (tenus à des engagements fermes pour une part, précisément conditionnés au soutien international pour l’autre) sur des politiques d’atténuation (énergies renouvelables) et d’adaptation (urbanisme résilient en cas d’inondation, par exemple).

État des lieux. En 2014 : 44 milliards par an ; en 2016, dernier montant connu : 66 milliards en promesse d’argent public, le reste étant espéré du secteur privé. Pour 2020, la France a promis 5 milliards € par an. Les financements de l’Agence Française de Développement (AFD) ne sont pas tous compatibles avec l’Accord de Paris : l’AFD finance encore des investissements gaziers ou des projets générant de la déforestation.

Deux enjeux importants : la prévisibilité des financements sur plusieurs années, ce qui n’est pas le cas actuellement, permettrait aux pays en développement d’investir ; la définition de règles claires sur les modalités de comptage de cette mobilisation.

Le Fonds vert pour le climat va devoir être reconstitué et financer à 50% l’adaptation et les pays plus vulnérables. Les contributions sont volontaires. Ce Fonds soutient déjà 70 projets de plusieurs milliards. Le financement du Fonds vert fait l’objet d’une cible de l’Objectif de développement durable n° 13 de l’ONU. L’alimentation de ce Fonds est en cours de discussion.

L’enjeu ? Que les pays annoncent leur volonté de fournir des financements. La précision des montants se fera ensuite.

Troisième enjeu : la plateforme du Dialogue Talanoa 2018

La COP a approuvé la conception du dialogue dit Dialogue Talanoa[4], et l’a lancé en janvier 2018. En effet, la COP24 a décidé de réviser les engagements nationaux dès 2020, pour des objectifs plus ambitieux.

L’Accord de Paris vise, en effet, à contenir le réchauffement « nettement en-dessous de 2°C », « et en poursuivant l’action … à 1,5°C », par rapport aux niveaux préindustriels, en 2100 ; les engagements cumulés des États pointent vers + 3,5°C ; d’où l’inquiétude des ONG en fin de sommet. Pour le GIEC, nous sommes à + 1,1°C (des études vont au-delà). Les États doivent réviser leurs promesses de contributions déterminées au niveau national (CDN) à 2030. L’Accord de Paris prévoit de relever l’ambition tous les 5 ans, dès 2023, une demande forte des Pays les Moins Avancés et des petits États insulaires, soutenus par l’UE. Ces engagements doivent être comparables et d’application transparente (redevabilité).

Les dangers des « mauvaises solutions »

Des auteurs[5] et le GIEC pointent certains dangers :  pour pallier l’augmentation des gaz à effet de serre, d’aucuns envisagent d’émettre des aérosols de souffre dans la haute atmosphère pour constituer une couche de « nuages » réduisant le rayonnement solaire. Technique irréversible, elle nécessite des émissions en continu, tout arrêt provoquant un bond soudain des températures. D’autres pensent à modifier la chimie des océans ou à stocker le CO2 en sous-sol. Ces « émissions négatives », jamais testées à grande échelle, sont risquées et posent des questions éthiques. Quid en matière de biodiversité et d’alimentation ? Pour toutes ces raisons, efficacité et sobriété sont des orientations à mettre en œuvre rapidement, aux côtés des énergies renouvelables.

[1] Groupe d’experts Intergouvernementaux sur l’Évolution du Climat, créé en 1988 par l’ONU, à la demande du G7.

[2] Le 4 avril 2018, la Pologne a confié à Alstom/GE la construction d’une « dernière » centrale à charbon (un gigawatt).

[3] « Les droits de l’Homme, le droit à la santé, les droits des peuples autochtones, des communautés locales, des migrants, des enfants, des personnes handicapées et des personnes en situation vulnérable et le droit au développement, ainsi que l’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et l’équité entre les générations ».

[4] Terme issu de la COP23 tenue aux îles Fidji (2017), un des États les plus vulnérables : raconter librement, en fidjien. Selon la CCNUCC : « La formule présente l’avantage d’amener les participants à assouplir leurs positions et à revisiter leurs idées en les confrontant à celles des autres. Ce style de dialogue privilégie l’échange et la participation, la découverte de points communs et la communication spirituelle autour d’un sens partagé ».

[5] Ainsi : Clive Hamilton, Les Apprentis sorciers du climat. Raisons et déraisons de la géo-ingénierie, Paris, Seuil, 2013, etc.