Rwanda, l’Eglise Catholique dans le processus de réconciliation

La dynamique de l’Eglise au Rwanda de l’après génocide consiste dans le travail pastoral de réconciliation et de résilience. Il y a déjà 30 ans. Le génocide perpétré contre les Tutsis en 1994 a emporté plus d’un million de vies humaines, détruit les relations humaines, mis en branle la confiance et la constitution intérieure des personnes sans oublier la destruction des infrastructures de base.

Au bout de ces trente années écoulées, le continuel travail de réconciliation post génocide a permis de poser les bases de la reconstruction du tissu social, faisant renaître un brassage des dynamiques diverses, gage du rétablissement de la confiance retrouvée. Et dans ce chantier, l’Eglise Catholique joue un rôle prépondérant.

Le 29 novembre 2019, lorsque l’Eglise au Rwanda faisait le regard rétrospectif sur son travail des 25 ans de réconciliation. Comme invitée d’honneur à la cérémonie marquant le regard retro de la contribution de l’église catholique, dans le cheminement de la réconciliation, la Première Dame du Rwanda, Madame Jeannette Kagame, a loué les efforts fournis par l’Eglise Catholique au Rwanda pour la cohésion communautaire nationale après les atrocités du génocide commis contre les Tutsis en 1994.

Après la période des urgences post génocide vers une certaine normalité, l’église catholique a entrepris une série d’actions visant à retrouver l’unité et à barrer la voie aux relents de haine ethnique. Entre autres actions, nous pouvons citer l’organisation du processus synodal extraordinaire sur l’ethnisme au Rwanda, visant à briser les velléités tribales et à appeler les rwandais à ouvrir leur cœur à la vérité, unique moyen de rendre justice pour les atrocités commises.  Nous évoquons également la célébration du double jubilé en 2000, la mise sur pied des projets et programmes de réconciliation et de guérison communautaire et, enfin, le développement de partenariats en ce domaine et les programmes de résilience, comme étapes-clés de ce processus au sein de l’Eglise.

La 30ème commémoration du génocide en cette année 2024, marque un pas décisif vers une cohésion compacte.  Au niveau de la Commission justice et paix du Rwanda, l’accent pour cette période commémorative, reste principalement la conception pastorale d’un programme d’accompagnement à un retour dans la communauté des anciens prisonniers du génocide qui purgent leurs peines. La commission travaille en amont et en aval, c’est-à-dire elle prépare les prisonniers eux-mêmes et la communauté d’accueil spécialement les rescapés et leurs familles. Notre approche pastorale consiste dans l’animation de la communauté et des individus, la sensibilisation et la mobilisation autour du pardon comme valeur spirituelle et humaine. Nous sommes au fait conscients de ce message du pape Benoît XVI qui écrit que « c’est en donnant et en accueillant le pardon, que les mémoires blessées des personnes et des communautés ont pu guérir et que les familles jadis divisées ont retrouvé l’harmonie » (Africae munus, 21).

Il est sans dire que la réconciliation et la résilience d’un peuple est un travail de longue haleine. Nous nous heurtons encore à des situations de blessures psychologiques et de traumatisme. Nous butons encore contre l’idéologie du génocide et le négationnisme qui se répand dans des formes variées. Le traumatisme transgénérationnel est visible aujourd’hui dans notre pays. Les jeunes de moins de 30 ans en manifestent des symptômes. Ceci pour exprimer la nécessité d’imaginer des apports multidimensionnels pour parier à cette situation.

L’Eglise est consciente de tous ces défis de notre époque. La réconciliation est une voyage, long et peut-être fatigant le long duquel nous apprenons à être ensemble et à s’accueillir mutuellement au-delà des clichés sociaux. Elle travaille aux côtés des instances administratives et des organisations de la société civile pour donner sens à la vie.

Pour le moment, il est indispensable d’inculquer dans les jeunes de ce pays et de cette région des grands lacs une culture de paix et de respect de la vie afin de leur préparer un futur radieux exempt de violences fratricides. Le futur pacifique se prépare.