FSM Tunis, 2013 : le Forum de la dignité
La 12ème édition du Forum social mondial (FSM) qui s’est tenue à Tunis du 26 au 31 mars 2013 a rassemblé plus de 50 000 participants venus du monde entier autour d’un slogan faisant écho à la révolution tunisienne : « KARAMA » – DIGNITE.
Il témoigne du dynamisme du processus du Forum social mondial (FSM).
Ce FSM de Tunis est historique : il y a quelques années, il semblait en effet inimaginable qu’un tel événement puisse se tenir dans cette région du monde.
De plus, l’assassinat du leader d’opposition, Chokri Belaïd, le 06 février dernier, avait créé d’énormes tensions dans la coalition au pouvoir composée du parti islamiste Ennadha et de deux partis de la gauche laïque . Ces derniers accusent Ennadha d’être responsable de cet assassinat.
Il était donc à craindre que le Forum renforce ces clivages par manque d’inclusivité.
Il n’en fut rien, bien au contraire. Ce FSM de Tunis a été un énorme succès. Non seulement par la qualité de l’organisation, mais aussi par la forte présence de la société civile tunisienne, dont de nombreux jeunes (rappelons que ce sont eux qui sont à l’origine de la « révolution du jasmin » tunisienne)!
Ainsi, des questions controversées comme la relation des mouvements sociaux avec l’Islam politique ou les droits des femmes (les femmes ont été très présentes et ont démontré qu’elles n’étaient pas prêtes à se laisser confisquer leur révolution) ont pu être débattues de manière contradictoire et apaisée. .
Parmi les autres thèmes principaux débattus lors du Forum, je retiens celui du modèle économique et social. Comme le soulignait notre partenaire tunisien, le FTDES, lors d’un atelier, la révolution est le produit de l’échec d’un modèle économique. Plus largement, une réflexion autour de l’encadrement des investissements étrangers pour qu’ils bénéficient réellement aux populations locales a été menée : un véritable enjeu pour les pays du Sud.
Autre enjeu primordial, traité lors de ce FSM : celui des migrations internationales. En effet, avec les guerres en Libye puis dans le nord du Mali, les routes migratoires se sont trouvées profondément bouleversées. Le FSM a donc permis aux représentants d’organisations d’aide aux migrants présents dans tous les pays qui jalonnent ces routes de coordonner leurs actions. Dans ce contexte également, la migration des Tunisiens vers l’Europe et le drame des disparus en mer ou « disparus de la révolution » a occupé une place particulière.
Par ailleurs, le FSM de Tunis a rassemblé des milliers de participants de toute la région Afrique du Nord et Moyen Orient – Marocains, Algériens, Egyptiens, mais aussi Syriens, Bahreïnis,…permettant ainsi de créer des réseaux régionaux d’acteurs de la société civile.
De nombreuse organisations catholiques étaient présentes, organisatrices de certains ateliers, comme plusieurs Caritas, dont le Secours catholique et le Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement- Terre Solidaire. . Ces organisations voient dans le processus du FSM un « signe des temps » d’une société civile qui se lève à un niveau mondial pour construire un monde plus juste et plus solidaire.
Repères :
Le FSM est né à Porto Alegre au Brésil en 2001 pour permettre à des organisations de la société civile du mode entier (Ong, syndicats, mouvements paysans, association de femmes, de quartier, etc.) de se rencontrer, de débattre ensemble des grands enjeux mondiaux, de créer des réseaux, de monter des campagnes citoyennes pour lutter contre les dérives du néo-libéralismes qui créent pauvretés et injustices et pour faire connaître des propositions concrètes d’alternatives. Des réponses comme l’annulation de la dette des pays pauvres, la taxe sur les transactions financières, le concept de souveraineté alimentaire, etc, ont été portées dans cette enceinte avant d’être reprises par les dirigeants politiques.
La Commission épiscopale Justice et paix du Brésil en est l’un des fondateurs.
Le FSM de Tunis en chiffres :
Participants : 50 000
Organisation : 10 000 bénévoles
Associations présentes : 4 500 dont 1 700 tunisiennes
Participants tunisiens : 20 000
Ateliers 1 700
Budget : 1, 1 million d’Euros