« Le Traité sur le commerce des armes (TCA), qui a été adopté après plus de six années de négociations diplomatiques, interdit aux États signataires d’exporter des armes conventionnelles en violation d’un embargo imposé sur les armes, ou des armes qui seraient utilisées pour des actes de génocide, de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre ou de terrorisme.

« Le parcours a été long et complexe, mais nous saluons cette initiative qui rendra le commerce international des armes plus transparent et responsable», a déclaré Michel Roy, secrétaire général de Caritas Internationalis. «Maintenant, nous devons assurer la mise en œuvre complète, par tous les gouvernements, de ce qui a été convenu, afin de pouvoir mettre en place un autre élément fondamental pour la consolidation de la paix dans le monde».

Les États membres ont voté – 154 voix pour, 3 contre et 23 abstentions – le contrôle du commerce mondial des armes dont le chiffre d’affaires annuel s’élève à 70 milliards de dollars (53,7 milliards d’euros).

Les effets dévastateurs des guerres alimentées par le commerce des armes sont visibles dans les communautés en voie de développement à travers le monde. Les Nations Unies affirment que, chaque année, 500 000 personnes meurent à cause de la violence armée. Outre les dégâts matériels, chaque année, des millions de personnes, craignant les effets du conflit, quittent leur foyer.

«Les réfugiés connaissent les coûts des conflits armés mieux que quiconque», a déclaré António Guterres, haut-commissaire des Nations Unies pour les réfugiés. «Pour eux en particulier, ainsi que pour les millions d’autres personnes que la violence armée a forcé au déplacement à l’intérieur de leur pays, l’adoption de ce traité est absolument nécessaire.»

Le traité réglemente toutes les armes conventionnelles, telles que chars de combat, véhicules blindés de combat, systèmes d’artillerie de gros calibre, avions de combat, hélicoptères d’attaque, navires de guerre, missiles et lanceurs de missiles, armes légères et armes de petit calibre. »

« L’espérance aujourd’hui – Pour une culture de la confiance »

Publication par André Talbot, prêtre du diocèse de Poitiers et membre de Justice et Paix, de ce livre aux Editions de l’Atelier.

A qui se fier alors que la période actuelle est marquée par le désenchantement, que l’économie est en crise, que la politique déçoit, que les religions inquiètent, que des comportements nouveaux déstabilisent? L’avenir est-il réservé aux cyniques et aux prophètes de malheur? L’expérience chrétienne est-elle vouée à l’indifférence? Pour cultiver de bonnes raisons d’espérer et répondre aux défis, André Talbot propose une lecture stimulante des cinquante dernières années, des mutations de la société, de l’Eglise. Une manière  de servir le goût de l’espérance par une approche positive de nos fragilités, empreinte d’une ouverture aux autres et de sollicitude mutuelle.

La conclusion appelle à la lucidité face au défi de l’avenir de la vie sur la terre et à celui de la mondialisation qui cohabite avec le règne de la grande pauvreté. « Il nous faut apprendre à cultiver une pensée complexe, ce qui suppose un travail en commun associant diverses compétences. (…) Quant à l’obsession de la concurrence, avec ce qu’elle comporte d’oppositions continues, d’apologies de la force et de mépris des fragilités, elle se révèle destructrice. »

Juin 2002 : les évêques du Congo-Brazzaville brisent le tabou de la gestion du pétrole, à la suite de guerres terribles, et demandent la transparence pour lutter contre les conflits et la corruption dans leur pays.

9 Avril 2013 : dans la foulée de la loi Dodd-Frank aux Etats-Unis, l’Europe parvient à un accord pour obliger les compagnies extractives à publier l’ensemble des versements faits dans l’ensemble des pays de production, et projet par projet, afin de disposer de données nationales et locales.

Ces avancées sont le résultat de plus de dix ans de campagne des coalitions d’organisations de la société civile pour la transparence des industries extractives, « Publiez Ce Que Vous Payez » (PCQVP).

Le pillage des ressources, frein majeur du développement.

Alors que les budgets d’aide publique au développement (APD) des pays riches régressent, la mobilisation des ressources domestiques dans les pays pauvres est un enjeu:

  • les sommes concernées sont plus importantes que les flux d’APD : selon les estimations du Global Finance Integrity, les capitaux illicites quittant les pays du Sud sont 10 fois plus importants que l’APD ;
  • retrouver de la souveraineté : les peuples et leurs dirigeants doivent bénéficier du pouvoir de décision et de mise en œuvre des politiques publiques. L’APD est très souvent affectée selon le bon vouloir du financeur.

Selon les mêmes sources, les sommes fuyant les pays du Sud et se retrouvant donc dans les paradis fiscaux ont trois origines :

  • l’argent du crime qui représenterait entre 30 et 35%,
  • la corruption entre 3 et 5 %,
  • l’évasion fiscale du fait des acteurs économiques et notamment des multinationales, entre 60 et 65%.

Le principal manque à gagner pour les pays du Sud est donc lié au mode opérationnel des firmes multinationales : fâcheuse tendance à faire apparaitre les produits d’activités réalisées dans des pays du Sud (et autres) dans des territoires à fiscalité faible ou nulle.

Parmi les nombreuses entreprises évoluant dans les pays pauvres, celles du secteur extractif occupent une place prépondérante. Or c’est souvent dans ces pays que les inégalités et les situations de pauvreté sont les plus criantes : malgré les sommes colossales que rapporte l’exploitation du pétrole, des minerais, du gaz et des ressources forestières.

Pour inverser la tendance au pillage des ressources de ces pays et leur permettre de gérer correctement les revenus générés, la première étape est de faire la transparence dans leur gestion, afin d’interpeller ensuite les gouvernements sur l’utilisation qui en est faite : ce secteur est géré de façon opaque à la fois par les compagnies exploitantes et les élites au pouvoir.

Une mobilisation internationale, mais surtout dans les pays concernés

Lancée en 2002, la campagne « Publiez Ce Que Vous Payez » a obtenu des résultats rapidement, notamment dès 2003 par la mise en place de l’Initiative de Transparence des Industries Extractives (ITIE) soutenue par la communauté internationale, les grandes institutions financières internationales et les pays occidentaux (dont sont issues la plupart des compagnies extractives). Ce processus regroupe, au niveau international et dans les pays de production, les compagnies, les gouvernements et les organisations de la société civile pour décider des standards de publication des sommes versées par les entreprises aux gouvernements afin de pouvoir ensuite questionner l’utilisation faite des revenus et débattre des arrangements fiscaux consentis aux compagnies.

Espace de dialogue inédit, ce processus de construction de l’État de droit souffre d’une carence forte: les parties prenantes y adhérent de façon volontaire Le succès dépend de la volonté politique des pouvoirs publics, souvent réticents à dévoiler les arrangements négociés avec les compagnies et l’utilisation douteuse des revenus pétroliers et miniers.

Les objectifs recherchés par les organisations de la société civile dans ces démarches de transparence sont :

  • La redevabilité des gouvernements: ont-ils utilisé ces ressources pour le bien public en construisant des écoles ou en formant des agents de santé? Ces revenus ont-ils permis aux dirigeants et à leurs familles d’acquérir de luxueuses demeures dans les beaux quartiers parisiens ou des bolides surpuissants, inutilisables sur les routes africaines?
  • La régulation du secteur: une fois la lumière faite sur les sommes versées par les compagnies, il s’agit de vérifier si elles correspondent à une juste contribution, en élargissant le champ de la transparence aux contrats signés avec les Etats, dans tous les territoires où elles sont présentes, au-delà des pays de production, et notamment dans les territoires à fiscalité faible ou nulle (où sont situées en général leurs filiales captant les marges bénéficiaires), et enfin dans les autres secteurs commerciaux, banques, construction, transport.

Des militants courageux

Cette campagne internationale n’aurait pu avoir de tels résultats si des coalitions d’organisations de la société civile ne s’étaient pas constituées dans les premiers pays concernés, notamment en Afrique subsaharienne.

A la fin des années 90, plusieurs organisations camerounaises et tchadiennes se sont mobilisées sur les enjeux pétroliers à l’occasion de la critique de la construction de l’oléoduc Tchad – Cameroun destiné à exporter le futur pétrole tchadien.

Parallèlement, des organisations d’Afrique Centrale, et notamment des deux Congos parviennent à faire le lien entre les conflits qui minent leurs pays, la corruption qui gangrène les régimes et la gestion de la rente minière et pétrolière.

De nombreux acteurs de ces mobilisations se retrouvent alors au sein des coalitions nationales PCQVP.

Plusieurs responsables deviennent vite des gêneurs. En questionnant la gestion de la manne minière et pétrolière et en dénonçant la gabegie et la corruption, ils sont considérés comme des opposants dont les gouvernants ne parviennent pas à acheter le silence.

Cela a été et est encore souvent le cas en Afrique Centrale. Au Gabon, Marc Ona, le responsable de la Coalition PCQVP a été arrêté une dizaine de jours en 2009, empêché de voyager plusieurs mois, et, récemment condamné pour diffamation du directeur de Cabinet de la Présidence de la République à la suite d’une mise en cause dans une affaire de conflit d’intérêt.

En République Démocratique du Congo, son homologue, Jean- Claude Katende, aujourd’hui représentant des organisations de la société civile au Conseil d’Administration de l’ITIE, a plusieurs fois été obligé de s’exiler pour fuir les menaces, souvent anonymes.

Au Congo Brazzaville, les deux coordinateurs, Brice Mackosso, de la Commission Justice et Paix de Pointe Noire et Christian Mounzeo, de l’association « Rencontre pour la Paix et les Droits de l’Homme » ont été emprisonnés plusieurs semaines pour avoir dénoncé avec vigueur la corruption et la mauvaise gestion  dans leur pays au moment où le gouvernement négociait difficilement des remises de dettes colossales avec la Banque Mondiale et les principaux bailleurs publics. Ces derniers avaient conditionné l’annulation de la dette à la mise en place de programmes de construction de l’Etat de droit et de lutte contre la corruption, et donc de l’ITIE.

Lorsque le Congo -Brazzaville a finalement pu entreprendre  son processus d’annulation de dettes, les deux militants ont été  arrêtés et emprisonnés, pour les « punir », les décrédibiliser, donc éviter de les nommer dans les instances ITIE. Une vaste mobilisation des membres de PCQVP a abouti à une demande de libération par le président de la Banque Mondiale, une première dans l’histoire de cette institution dans une affaire de droits de l’Homme. Depuis, le comité ITIE a pu se mettre en place et grâce à la persévérance et à l’expertise des organisations PCQVP, le Congo Brazzaville a pu, après un parcours erratique, obtenir un satisfecit de l’ITIE en février 2013.

Cet épisode  conforte le besoin de disposer d’un réseau efficace d’acteurs de la société civile pour protéger et secourir des militants qui s’attaquent aux fondements des régimes en place (corruption, népotisme, mauvaise gestion) dans des pays où l’opposition politique est souvent faible et déstabilisée par le pouvoir.

Des lois contraignantes, complémentaires des  espaces de dialogue volontaire

Conscients que les succès de l’ITIE dépendent trop de la volonté des régimes en place, les organisations PCQVP[1] ont œuvré pour que des lois contraignantes de transparence soient votées, d’abord dans les territoires dont sont issues la plupart des compagnies.

Ceci a pu se concrétiser à partir de 2010 avec le vote de la loi Dodd -Frank aux États-Unis. Dans le cadre de cette loi de régulation financière, les organisations de PCQVP ont réussi à faire inscrire des dispositions obligatoires de transparence pour les entreprises du secteur extractif cotées aux Etats-Unis. Le lobby pétrolier américain a alors déposé une plainte qui semble avoir peu de chances d’aboutir.

Dans la foulée, l’Union Européenne a validé un accord entre la Commission, le Conseil (gouvernements) et le Parlement, s’étendant de plus au secteur forestier et aux grandes entreprises non cotées.

Selon ces deux législations, les entreprises devront donc publier des données comptables pour chaque pays de production et pour chaque projet industriel : les communautés locales disposeront de données financières pour interpeller leurs autorités.

Cela permettra de disposer de publications standardisées et donc de comparer les versements entre les différents pays. Ces législations et l’ITIE sont complémentaires, les comités nationaux étant le lieu adéquat pour utiliser les données.

Reste maintenant à poursuivre cette action en convaincant des pays cruciaux d’adopter des législations similaires. Cela semble illusoire à court terme pour la Russie et ses géants gaziers, mais indispensable pour le Canada, véritable plaque tournante, paradis fiscal de l’extractif.

Transparence: après la corruption, l’évasion fiscale

Dans le même temps, se joue une possible redéfinition des règles fiscales internationales concernant les grandes multinationales où le secteur extractif tient une part majeure. Après les révélations sur l’évasion fiscale de grands groupes comme Microsoft, Google, Amazon ou Starbuck, l’OCDE a admis récemment que les dispositions qu’elle promeut depuis des années n’étaient plus adaptées à la réalité et, pire, qu’elles avaient souvent eu l’effet inverse de ce qu’elles devaient produire. La non- double imposition des entreprises (dans le pays source et le pays d’activité) s’est transformée en double non-imposition, les entreprises parvenant à ne payer d’impôts nulle part!

Les responsables politiques semblent décidés à réformer ces règles fiscales. La transparence pays par pays, promue depuis des années par les organisations de la société civile, apparaît comme la première étape indispensable.

La France a été le premier pays à la  décider pour ses banques en février dernier, grâce aux parlementaires. Elle a été suivie par l’Union Européenne. D’autres mécanismes sont nécessaires pour que les entreprises payent leurs impôts là où elles ont leurs activités.

Mais un élément  est primordial : les pays du Sud, premières victimes de la corruption et de l’évasion fiscale, doivent être impliqués dans ces processus d’élaboration de nouvelles règles du jeu. Or les discussions stratégiques se déroulent pour l’instant sans eux au sein du G20 et de l’OCDE, clubs des pays les plus riches.

http://www.publishwhatyoupay.org/fr

[1] Les Amis de la Terre, Amnesty International – Section Française, CARE France, CCFD – Terre Solidaire, CIMADE, Secours Catholique / Caritas France, FIDH – Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme, Info Birmanie , Justice et Paix , Oxfam France, ONE France, Partenia 2000, SHERPA, SURVIE, Transparence-International (France

Dans un de ses romans, Maurice Leblanc imagine Arsène Lupin, nommé chef de la Sûreté.

Le grand argentier, le ministre socialiste Jérôme Cahuzac, chargé de lutter contre la fraude fiscale, la pratiquant lui-même et mentant effrontément au président de la République, au premier ministre et à la représentation nationale : la réalité dépasse la fiction.

Les partis de droite pensent généralement  qu’en politique les choix se font rarement entre le bien et le mal, mais entre le pire et le moindre mal, l’important étant d’assumer ces choix et de les expliquer.

Mais, comme le rappelle  Jacques Julliard (Les gauches françaises, Flammarion, 2012) en ce qui concerne l’adhésion aux idées de gauche, elle se fait autour de la croyance que le sens de l’histoire n’est rien s’il ne se traduit par un progrès de la moralité individuelle et collective (d’où le sentiment qu’en ce cas précis, la faute d’un homme atteint un idéal politique tout entier).

Pour autant, une politique qui se voudrait essentiellement morale ne serait généralement que la négation du réel. La démocratie prend les hommes tels qu’ils sont et ne cherche pas à modifier leurs mœurs, mais, si ses institutions et ses lois sont bonnes elle peut encourager l’esprit civique ; l’ambition est peut-être limitée ;c’est tout de même plus satisfaisant que de vouloir imposer la vertu, ce qui a toujours amené des politiques de terreur.

Sommes- nous donc condamnés à revenir sans cesse à la célèbre distinction de Max Weber entre éthique de conviction et éthique de responsabilité ?Un élément de débat se trouve peut être dans un film récent qui raconte les derniers mois de Lincoln, icône s’il en est de la morale et de la rigueur. L’on découvre qu’il retarde sciemment les négociations avec les sudistes pour mettre fin à la guerre de Sécession et qu’il achète les voix d’un certain nombre de congressistes afin de faire passer le treizième amendement : l’abolition de l’esclavage, qui va fondamentalement changer l’avenir de son pays.

Ne recherchons pas la transparence totale, elle serait insupportable ; contrôlons, réprimons les fraudeurs, mais la démocratie fonctionne parce qu’elle maintient une certaine séparation entre la sphère privée et la sphère publique.

Les mesures qui viennent d’être prises vont probablement dans le bon sens, mais elles n’auraient pourtant pas empêché ce qui s’est passé. Ces mesures seraient plus crédibles, si tous les agents publics étaient soumis à des procédures et à des institutions donnant les garanties d’un exercice impartial des charges publiques. Elles le seraient davantage si, enfin, s’engageait une véritable lutte pour éradiquer les paradis fiscaux en Europe et dans le monde.

Et puis ne généralisons pas : il y a en France 550 000 hommes et femmes élus. L’immense majorité est honnête, sincère, rigoureuse et au service du bien commun.

Repères

Max Weber, Le savant et le politique, Plon 10/18, Paris 1995 :

« Il n’existe aucune éthique au monde qui puisse négliger ceci : pour atteindre des fins « bonnes », nous sommes la plupart du temps obligés de compter avec, d’une part des moyens moralement malhonnêtes ou pour le moins dangereux, et d’autre part, la possibilité ou encore l’éventualité de conséquences fâcheuses. Aucune éthique au monde ne peut nous dire non plus à quel moment et dans quelle mesure une fin moralement bonne justifie les moyens et les conséquences moralement dangereuses. »