Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

Télécharger la Lettre n°304 septembre 2024  (PDF)   

Les 12 et 13 février, Maria Hammershoy et Mgr Antoine Hérouard, co-présidents de Justice et Paix Europe, se sont rendus à Lviv en Ukraine. Ils étaient accompagnés de Stefan Lunte, secrétaire général de Justice et Paix Europe. La délégation répondait ainsi à l’invitation de Yuriy Pidlisny, président de la Commission pour la famille et la société de l’Eglise gréco-catholique ukrainienne. Cette commission est membre du réseau des trente commissions Justice et Paix d’Europe. Au cours de leur séjour en Ukraine, ils ont été reçus par l’archevêque gréco-catholique de Lviv Ihor Vozniak, cssr, et son évêque auxiliaire Volodymyr Hrutsa, cssr. Ils ont rencontré le père Bogdan Prach, ancien recteur et vice-président du sénat de l’Université catholique ukrainienne, ainsi que la présidente de Caritas Ukraine, Tetiana Stawnychy. Ils ont visité plusieurs cimetières militaires et ont constaté les dégâts causés aux bâtiments par les attaques de missiles russes. Ils ont prié et célébré la messe pour les victimes de la guerre. Sur le chemin du retour, ils ont été reçus par Mgr Adam Szal et son prédécesseur Mgr Josef Michalik à Przemysl, du côté polonais de la frontière polono-ukrainienne.

Résumant leur visite, Mgr Hérouard a déclaré : « Grâce à notre visite ici, nous avons mieux compris comment le peuple ukrainien ne défend pas seulement sa liberté. Par son sacrifice, il défend également l’idée d’une Europe libre et démocratique dans son ensemble. » Maria Hammershoy a ajouté : « Protéger la vie et la dignité de la personne humaine, ainsi que partager la douleur de la guerre restent des préoccupations constantes. En s’occupant des victimes de la guerre, en écoutant leurs histoires et en répondant à leurs besoins fondamentaux, l’Église d’Ukraine montre, à travers ses structures, qui elle est. »

La délégation de Justice et Paix Europe a remercié la commission Famille et Société pour l’invitation et a exploré la possibilité d’organiser une réunion plus importante du réseau en Ukraine dans les années à venir. Elle s’était rendue en Ukraine après une réunion avec les secrétaires généraux des commissions nationales de Justice et Paix qui s’est tenue du 9 au 11 février à Berlin. Le thème de cette réunion était la solidarité avec les réfugiés ukrainiens et avec l’Ukraine et les participants ont adopté une déclaration sur ce thème.

 

Bruxelles, le 14 février 2024

Les Secrétaires généraux des Commissions Justice et Paix d’Europe se sont réunis à Berlin du 9 au 11 février, au lieu de la ville de Lviv qui n’a pas été jugée suffisamment sûre en raison de la guerre qui se poursuit en Ukraine. A Berlin, nous avons écouté des réfugiés d’Ukraine et des organisations qui les soutiennent. Samedi soir, nous avons prié pour la paix devant l’ambassade de Russie, et dimanche, nous avons célébré la Sainte Eucharistie avec la paroisse ukrainienne gréco-catholique locale. L’invasion russe à grande échelle et sans provocation de l’Ukraine, y compris les bombardements de terreur contre la population civile, des crimes de guerre et une occupation brutale, a forcé plus de 6 millions de personnes à quitter leur patrie et à se réfugier à l’étranger. En outre, 3,6 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays.

Jusqu’à présent, l’espoir des réfugiés de retourner dans une patrie libérée est déçu. Deux ans après la nouvelle escalade de la guerre, la Fédération de Russie n’a pas cessé d’infliger des souffrances et la mort à la population ukrainienne. Nous sommes conscients que le plus grand sacrifice est néanmoins consenti par le peuple ukrainien. Ils risquent aussi leur vie pour la liberté et la sécurité du reste de l’Europe. C’est pourquoi nous avons le devoir moral d’accroître notre aide à ce peuple afin de protéger sa vie[1]. Nous nous félicitons vivement de la décision du Conseil de l’Europe d’ouvrir des négociations avec l’Ukraine en vue de son adhésion à l’Union européenne. Nous espérons que ce processus débouchera également sur un renforcement des relations culturelles, économiques et personnelles.

En tant que chrétiens, mais aussi en tant qu’Européens, nous sommes appelés à pratiquer une solidarité continue. Nous sommes appelés à faire preuve d’empathie et de compréhension à l’égard du peuple ukrainien, y compris des réfugiés, qui craignent constamment pour leurs proches, qui sont restés en Ukraine et dont la vie, la dignité et la liberté sont menacées.

Les marchands de désinformation tentent de diviser nos sociétés. Dans leur propagande, ils montent les uns contre les autres différents groupes de personnes dans le besoin. Ils utilisent comme toile de fond l’augmentation du coût de la vie dans toute l’Europe comme résultat de la guerre[2] pour tenter de briser la solidarité avec les victimes de l’agression russe. En tant que chrétiens, nous sommes appelés à prendre fermement position contre une telle agitation, qui est en contradiction flagrante avec l’enseignement social de l’Eglise. Aucune forme de nationalisme ethnocentrique et de racisme n’est compatible avec les valeurs chrétiennes.

Nos valeurs chrétiennes nous obligent à aimer tout le monde. Comme le dit le pape François dans son encyclique Fratelli Tutti, « l’amour ne se préoccupe pas de savoir si un frère ou une sœur dans le besoin vient d’un endroit ou d’un autre. Car l’amour brise les chaînes qui nous isolent et nous séparent ; à leur place, il construit des ponts. L’amour nous permet de créer une grande famille, où tous peuvent se sentir chez soi… L’amour respire la compassion et la dignité. » Nous sommes appelés à créer un cadre qui permette aux réfugiés – et pas seulement ceux d’Ukraine – de vivre une vie qui leur permette au moins un certain degré de normalité et d’intégration dans la société d’accueil. Cela nécessite un soutien psychosocial suffisant, la possibilité de participer à la vie de la communauté et d’accéder au marché du travail.

Nous remercions les nombreux bénévoles et collaborateurs à temps plein qui s’engagent pleinement à soutenir les réfugiés. Un tel engagement énergique doit être encouragé et soutenu.

Notre plus profond respect va aux nombreux efforts entrepris par les réfugiés eux-mêmes. Malgré l’énorme pression psychologique causée par la guerre et l’inquiétude pour leurs proches, de nombreux réfugiés s’efforcent d’apprendre la langue de leur pays d’accueil. Ils en soutiennent l’économie par leur travail et établissent des contacts avec la population locale. Cela devrait être non seulement encouragé, mais aussi apprécié.

Tous les moyens diplomatiques disponibles au niveau de la coopération multilatérale doivent être utilisés pour accroître la pression sur la Fédération de Russie pour qu’elle mette fin à l’effusion de sang et aux souffrances et qu’elle cesse immédiatement ses attaques contre les fondements du droit international, des droits de l’homme et contre l’ordre international de paix.

Nous implorons sincèrement nos partenaires des autres continents de s’adresser à leurs gouvernements et de plaider en faveur de la paix et de la justice en exerçant des pressions diplomatiques sur la Fédération de Russie et en rejetant clairement l’impérialisme de ce régime.

La vérité et la justice sont les conditions préalables à une paix durable[3]. En ce sens, la façon dont nous traitons les réfugiés détermine également les chances de paix et de réconciliation. Travailler avec les réfugiés et les victimes de la guerre, c’est aussi travailler à la paix.

Berlin, le 11 février 2024

[1] http://www.juspax-eu.org/en/dokumente/220515-Statement-of-JP-Europe-on-War-in-Ukraine.pdf.
[2] Sur la question du traitement constructif des craintes et des préoccupations, voir également l’Action concertée de Justice et Paix Europe 2023/2024 : http://www.juspaxeu.org/de/home/index_include.php?includeDocument=Concerted-Action-2023-2024.php
[3] http://www.juspax-eu.org/en/dokumente/221210-Statement-HRD-EN.pdf

Mardi 12 mars 2024
Depuis neuf ans, le Service National Mission et Migrations de la Conférence des Évêques de France (CEF) organise une journée d’étude annuelle sur un thème lié à l’actualité. Cette année, elle portera sur « Frontières, Méditerranée et Migrations ».
Cette journée, ouverte aux membres du réseau de la pastorale des migrants et plus globalement à toute personne intéressée par le sujet, a pour objectifs de contribuer à éclairer les enjeux d’un sujet différent chaque année, de proposer quelques repères susceptibles de fonder un agir et de faire connaître des bonnes pratiques. L’ouverture à un large public permet d’élargir le réseau et de bâtir des liens entre les acteurs concernés.

Notre sujet 2024 : « Frontières et Méditerranée ».

Voir le programme sur le site Mission et Migrations et télécharger le flyer 2024