Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

Télécharger la Lettre n°304 septembre 2024  (PDF)   

Session organisée par la Chaire « Sciences, technosciences et foi, à l’heure de l’écologie intégrale » de l’université catholique de Lille, en partenariat avec l’équipe de Roc-Estello.
Ouverte à tous les chercheurs de Dieu qui s’intéressent à l’être humain.

Avec la participation de Thierry Magnin, V-G Delory, M-J Coutagne, P. Dumoulin, M. et G. Voisin, T. Lavabre, D. Lambert, etc.
Un concert sera proposé le jeudi soir et possibilité de monter à la Sainte-Baume le Vendredi après-midi.

Hébergement sur place à réserver (Tarifs sur le site de Roc-Estello)

Dans le cadre enchanteur de Roc-Estello, face au massif de la Sainte Baume, un temps de réflexion et de débat.
La session est suivie par une autre, les 26 et 27 août sur Pierre Teilhard de Chardin. Il est possible de cumuler les deux sessions.

Ia ora na (Bonjour) !
L’archidiocèse de Papeete, composé de 105 îles réparties sur une superficie d’océan comparable à celle de l’Europe, s’étend sur la quasi-totalité de la Polynésie française. Sa population est d’environ 300 000 habitants, dont 70 000 à 80 000 catholiques, le reste se répartissant entre Protestants (principalement évangéliques, plus nombreux que les catholiques ou autres, comme les adventistes, pentecôtistes…) ou d’autres groupes minoritaires (mormons, Témoins de Jehova, non baptisés d’ascendance chinoise…).

Pour desservir les 82 paroisses, le diocèse ne dispose que de 30 prêtres dont 21 diocésains. Aussi, depuis les origines du diocèse, fondé en 1848 et qui a toujours souffert d’un manque chronique de prêtres, l’évangélisation et la pastorale reposent pour une grande part sur les laïcs. Les petites paroisses des îles ne reçoivent la visite du prêtre que pendant quelques semaines, parfois une ou deux fois par an ; en temps habituel, la paroisse est donc confiée à des ministres laïcs, les Katekita, qui dirigent le culte du dimanche et la prière des jours ordinaires, veillent à la catéchèse, conduisent les funérailles, etc. Les 53 diacres permanents, (dont 7 fraîchement ordonnés en 2023), proches du peuple, ont également une grande place dans l’Église locale.

La liturgie est vivante, les laïcs s’engagent volontiers dans le service paroissial ou dans les mouvements (Légion de Marie, Rosaire vivant, Cursillos…). Le renouveau charismatique connaît un développement important et chaque année les retraites spirituelles attirent plusieurs milliers de personnes.

La vie en Polynésie
Les visiteurs recherchent des paysages de rêve, l’éden semble-t-il ! Le touriste qui accepte la rencontre avec les Polynésiens découvre tout un art de l’accueil, empreint de simplicité et du sens de l’autre.

Parmi les îles de l’archipel, on distingue les îles hautes (d’anciens volcans, dont les pentes riches en alluvions favorisent les cultures vivrières) et les atolls, où la culture du cocotier tient une place importante. La vie sur un atoll est rude. L’eau, élément de survie, est le bien le plus précieux. Chaque habitation a sa citerne d’eau douce, eau de pluie précieusement récupérée. L’électricité est produite par des groupes électrogènes ou des panneaux solaires. Les îles sont reliées par des petits aérodromes.

Les atolls de l’Est où la qualité de l’eau du lagon ne permet pas de cultiver les huîtres perlières sont les îles les plus pauvres. Pêche et coprah sont les seules activités rémunératrices. Le revenu mensuel ne dépasse pas les 800 euros. Tahiti et les îles de la Société ont aussi leurs “îlots” de pauvreté, des constructions précaires, insalubres, où la promiscuité ainsi que les fléaux de l’alcool et de la drogue engendrent leur lot de problèmes sociaux.

Voilà la Polynésie, terre de paix et de contrastes, terre d’accueil et de souffrances, terre des hommes à évangéliser sans cesse.

Formation des prêtres et des laïcs
La formation des laïcs est un enjeu majeur. Chaque année depuis 1970, des écoles de formation pour les laïcs Katekita (Catéchèse, Musique et Liturgie, École de la Foi pour les jeunes, pour les ministres de la Sainte Communion ou en langue tahitienne) ouvrent leurs portes pour quatre semaines l’été, regroupant ainsi entre 500 et 700 élèves, adultes ou jeunes de plus de 16 ans, et rassemblant au total plus de 50 formateurs. À noter que les élèves comme les formateurs prennent sur leurs congés d’été pour suivre ou assurer les cours. Un des résultats a été de motiver les laïcs à s’engager dans les services d’Église, depuis l’évangélisation jusqu’aux services pour les pauvres et les marginaux.

Après avoir compté longtemps sur les religieux missionnaires, l’Église locale a compris un jour que si elle n’était pas capable de produire des prêtres, elle n’en aurait bientôt plus. Le défi a été relevé, et, depuis 1992, date des premières ordinations, jusqu’en 2019, 15 prêtres sont sortis du séminaire local. Aujourd’hui, ils sont 5 candidats au Séminaire Notre Dame de l’Espérance à Orléans, envoyés par leur évêque, à se former en métropole depuis la fermeture du Séminaire de Papeete. Les diacres permanents, eux, bénéficient depuis 1975 d’une école diaconale et sont formés sur le terrain pour le ministère paroissial.

Lourde charge pour le diocèse, la formation des prêtres est cependant considérée comme une tâche prioritaire par tous, car la promotion des laïcs et l’ordination de diacres permanents n’a fait qu’accentuer la souffrance des fidèles de ne pas avoir assez de prêtres pour assurer leurs besoins spirituels.

L’Église locale essaie de faire face à tous ces défis avec détermination et optimisme.

 

 

 

Elle est composée de 5 archipels : archipel de la Société (îles du Vent et îles Sous le Vent), archipel des Tuamotu, des Gambier, des îles australes et des îles Marquises ; au total 118 îles dont seulement 76 habitées et une population d’un peu plus de 300 000 habitants.

Protectorat français à partir de 1842, Établissement Français d’Océanie en 1880, elle devient Territoire d’Outre-Mer sous le nom de Polynésie Française en 1957 et, en 2004, Pays d’Outre-Mer. L’État Français est représenté par un Haut-Commissaire de la République, ayant à peu près les fonctions d’un préfet. Le pouvoir est partagé entre l’assemblée territoriale (élue au suffrage universel) et son président et le gouvernement dirigé par le président de la Polynésie Française.

La pirogue à balancier unique le Va’a est le symbole de ce peuple de navigateurs, berceau du surf. La monnaie est le franc pacifique, les principales ressources sont, le tourisme, la vanille, la perliculture, la pêche et le coprah. Il n’y a ni RSA, ni caisse de chômage et ¼ de la population vit sous le seuil de pauvreté bien que la France injecte 1,7 milliard d’euros chaque année.

En 1949, Pouvana’a a Oopa fonde le RDPT (Rassemblement démocratique des populations tahitiennes), parti autonomiste et la même année Rudy Bambridge fonde lui l’Union tahitienne, attachée à la métropole. Pouvana’a a Oopa devient chef du gouvernement local en 1957. Mais en 1958 au référendum sur la constitution de la Ve république, la Polynésie française vote oui, sauf les îles Sous le Vent son fief. Pouvana’a est arrêté malgré son statut de député et condamné à l’exil, les pouvoirs du gouverneur sont alors renforcés.

En 1962, le Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) est installé à Mururoa, et Fangataufa, avec la venue de près de 15 000 militaires, marins, ingénieurs et leurs familles. Jusqu’en 1996, la Polynésie connaîtra 46 essais atmosphériques et 147 souterrains. Peu de débats sur ces essais en métropole sauf lors de l’affaire du Rainbow Warrior en 1985.

L’installation du CEP a eu des conséquences durables. D’abord, les retombées des essais et une impression de légèreté et d’inconséquence de la France : quid de l’atoll ? de la contamination de la chaîne biologique ? des maladies ? de la radioactivité ? ou encore de l’enfouissement des déchets ? Ensuite, l’arrivée massive de métropolitains a entraîné des transferts financiers très importants sans création réelle de richesse. Le mode de vie des populations locales a été profondément transformé, et le jeu politique local également.

Si l’indépendance avait le vent en poupe dans les années 50, ce sont les mouvements autonomistes qui vont prendre le dessus en acceptant la manne que représentait le CEP. L’Union tahitienne (Gaston Flosse succède à Rudy Bambridge) se rallie aux gaullistes et approuve la politique gouvernementale et prend le nom de Tahoera’a huira’atira, alors que le RDPT la conteste ce qui entraîne sa dissolution en 1963. Un peu plus tard, Oscar Temaru crée le Front de libération de la Polynésie, FLP/Tāvini Huira’atira, résolument indépendantiste.

À partir de 1990, et pour près de 15 ans, Gaston Flosse dirige la Polynésie et met l’ensemble du pouvoir au service de son parti (il sera définitivement condamné en 2014 et perdra tous ses mandats). En 2004, plusieurs partis indépendantistes se regroupent autour de Tāvini qui devient l’Union pour la démocratie (UPLD) et, en 2011, Oscar Temaru demande l’inscription de la Polynésie sur la liste des territoires non autonomes à décoloniser de l’ONU (fait lors de l’Assemblée générale de l’ONU du 17 mai 2013), mais Gaston Flosse qui vient à nouveau de remporter les élections fait voter un vœu confirmant le souhait des polynésiens de rester français.

Au retrait « officiel » de Flosse, Édouard Fritsch devient président de la Polynésie. Lors des dernières élections de 2023 il est battu, au cours d’une triangulaire opposant deux listes autonomistes et la liste indépendantiste menée par Moetai Brotherson, cette dernière remportant l’élection.

Le 11 mai, Moetai Brotherson (gendre d’Oscar Temaru) est élu président de la Polynésie tandis que Antony Géros est élu président de l’Assemblée. Brotherson est très prudent sur la marche vers l’indépendance et ne prévoit pas de référendum avant une quinzaine d’années et ce après avoir démontré que la Polynésie peut assumer son destin, tandis que la vieille garde du parti et le président de l’Assemblée sont impatients de réaliser cette indépendance.

Le problème de la présence de la France dans le Pacifique se trouve ainsi posé en Polynésie et en Nouvelle Calédonie. La France est une très grande puissance maritime grâce à ces territoires, la moitié des eaux maritimes françaises (5 millions de km2), se trouve en Polynésie. Récemment, les États-Unis sont intervenus avec force, devant la montée en puissance des ambitions chinoises et dans cette nouvelle configuration géo stratégique, la présence de la France n’est plus forcément regardée d’un mauvais œil par les pays de Sud Pacifique, mais reste à traiter l’avenir politique de ces territoires.