Les agriculteurs indonésiens inquiets pour l’avenir
Ecologie et covid-19 : devant les ravages de la culture intensive de l’huile de palme le confinement préconisé par le président indien pourrait être une bonne nouvelle écologique, mais il se révèle d’abord comme une catastrophe pour 10 millions d’ouvriers des palmeraies en Indonésie.
Selon les fermiers des palmeraies indonésiennes, un blocage total du pays entraînerait de graves conséquences pour près de 10 millions d’entre eux. Alors que plusieurs membres du Parlement ont pressé le président Joko Widodo de renforcer les mesures et de lancer un confinement total du pays, les petits producteurs estiment qu’une telle décision risquerait d’entraîner la fermeture d’usines et des troubles graves. Le 26 mars, le président a appelé à soutenir les plus exposés en priorité : « Nous devons aider les ouvriers, les travailleurs à la journée, les fermiers, les pêcheurs et les petites entreprises pour qu’ils puissent résister. »
Les ouvriers d’une palmeraie de Riau, à Sumatra, dont la production doit être transportée vers une usine. Près de 10 millions d’entre eux risquent d’être affectés par les mesures de quarantaine annoncées par le gouvernement.
Les ouvriers des palmeraies indonésiennes et les producteurs d’huile de palme ont demandé au président Joko Widodo de ne pas imposer un confinement total du pays, comme l’ont suggéré plusieurs législateurs contre la propagation de l’épidémie du coronavirus Covid-19. Un blocage
total du pays pourrait frapper durement plus de dix millions d’agriculteurs à travers l’archipel et causer de graves troubles dans tout le pays, selon eux. Plusieurs membres du Parlement ont pressé le gouvernement indonésien d’imiter la Malaisie et les Philippines en imposant un confinement total, alors que les recommandations préventives sur les distances de sécurité à respecter n’ont pas été efficaces face à la crise sanitaire. Toutefois, le président indonésien a confié que le confinement de la population à domicile ne serait pas sa priorité. Joko Widodo a ajouté qu’il se concentrerait davantage sur diverses mesures destinées à maintenir l’économie à flot, en appelant les gouverneurs, maires et responsables locaux à fournir une alimentation d’urgence aux personnes à bas revenus. « Nous devons aider les ouvriers, les travailleurs à la journée, les fermiers, les pêcheurs et les petites entreprises pour qu’ils puissent résister », a déclaré le président Widodo le 26 mars. Selon une déclaration du groupe Indonesian Palm Oil Farmer Union, le syndicat principal représentant les palmeraies du pays, « un confinement total compliquerait encore plus la vie des fermiers des palmeraies, parce que cela affecterait la distribution voire même la fermeture d’usines de production d’huile de palme ». Pour l’organisation, si les fermiers s’arrêtent de travailler, les usines vont devoir fermer et les ouvriers risquent d’être frappés par la famine.
« La pandémie a entraîné la chute du prix de l’huile de palme et des exportations vers la Chine, l’Arabie Saoudite et l’Europe », a confié Mansuetus Darto, secrétaire général du syndicat. Avant la crise sanitaire, le prix des fruits des palmiers à huile était de 0,14 dollars US par kg ; mais le prix est tombé à 0,08 dollars par kg à ce jour, et il pourrait encore chuter durant les prochaines semaines. « C’est pourquoi nous supplions le gouvernement de ne pas considérer l’option d’un confinement total du pays. » Iwan Himawan, qui travaille dans une palmeraie du district de Pasir, dans le Kalimantan oriental, estime qu’il préfère vendre de l’huile de palme à bas coût plutôt que pas du tout. Iwan Himawan, qui possède deux hectares de palmiers à huile, explique que ce qu’il craint le plus avec un confinement total, ce sont les conflits que cela pourrait engendrer parmi la population locale. « Quand les usines de la région devront fermer, les gens seront en colère », prévient-il. Le père Frans Sani Lake, directeur de l’institut Justice, Paix et Intégrité de la Création dans la région du Kalimantan, estime que le confinement peut être appliqué à condition de respecter les besoins des fermiers et des travailleurs. « La priorité du gouvernement doit être de protéger notre peuple, en particulier les plus vulnérables comme les agriculteurs et les ouvriers à la journée », insiste le prêtre. Au 26 mars, l’Indonésie a enregistré 893 cas d’infection au Covid-19 et 78 décès.