Éthique sociale en Église n°71 août 2024

1 – Des stars déboulonnées
La face sombre de personnages adulés continue d’être révélée, c’est le cas notamment avec l’abbé Pierre. Il est sain que les victimes puissent s’exprimer et être reconnues comme telles. Il faut aussi s’interroger sur les conditions dans lesquelles de tels actes destructeurs ont pu être commis, sur les croyances et les habitudes qui favorisent de telles attitudes prédatrices. La mise au pinacle de personnes qui ont parfois réalisé de grandes choses apparaît malsaine. Elle tend à confondre une figure avec l’institution qui met en oeuvre les intuitions fondatrices, et cela a deux conséquences : une personnalité devient une star tandis que l’engagement résolu d’une multitude d’acteurs se trouve relégué au second plan.

+ Quand un humain est élevé au rang de modèle ou de génie on ne veut voir que ses qualités, en masquant ses traits inquiétants ; c’est encore plus prégnant quand le personnage se trouve nimbé de sacré, à la manière d’une « icône ». Le délire de toute-puissance risque alors de s’installer et de conduire à des emprises destructrices, tandis que les victimes ne peuvent dénoncer l’auteur puisque ce serait attenter au sacré.

+ La mise en avant d’un seul personnage ne rend pas compte du fait qu’une institution, notamment lorsqu’elle implique des humains fragiles, ne peut s’établir et grandir que grâce au travail et à la compétence de personnes engagées à tous les niveaux ; pensons notamment aux belles réalisations d’Emmaüs. Il est donc plus juste de mettre en avant l’oeuvre communautaire, ce qui suppose que des responsabilités précises soient assumées, ce qui permet d’éviter le vedettariat qui masque le travail collectif tout en risquant de conduire un personnage à se comporter comme une star, avec tous les dangers que cela comporte. (J’ai développé cette thématique dans un livre : Un goût de fraternité, 2023).
On peut élargir le propos à notre situation politique. La centralisation du pouvoir, ainsi que la mise en avant de personnages singuliers (même s’ils ont reçu « l’onction » électorale), au détriment de projets sérieux et mûris, tout cela conduit à un affaiblissement du politique au sens d’une vie commune assumée positivement par l’ensemble des citoyens.

2 – Promouvoir les droits humains
Un atelier du Centre théologique va continuer de réfléchir aux « repères pour vivre ensemble » en travaillant sur la référence aux droits humains fondamentaux. L’actualité, au niveau mondial mais aussi dans le cadre des débats nationaux, montre que ces droits se trouvent souvent ignorés, voire bafoués. Pour raviver une telle référence et montrer sa fécondité actuelle, il est nécessaire d’articuler correctement éthique et politique. J’assure l’animation des séances, mais il s’agit bien d’un travail collectif qui suppose la participation active de chacun des membres du groupe. Première rencontre : jeudi 5 septembre, de 16h à 17h30, Maison Saint-Hilaire 36 bd Anatole France à Poitiers.

Père André Talbot
Rendez-vous dans un mois pour le prochain numéro de # DIÈSE

 

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