Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

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Loin de toute nostalgie de ces temps heureux de la révolution démocratique en Europe, alors que nous devrions être actifs dans l’actuelle révolution démocratique des pays arabes, il peut être utile d’insister sur quelques aspects de l’illustre homme tchèque à l’orée de 2012.

Un chrétien dans un pays très sécularisé. Ceux qui connaissent la République tchèque ou les statistiques religieuses savent que ce pays est l’un des plus sécularisés du continent. Havel, personnage clé de ce moment fondateur de la vie du pays qu’est la révolution de velours était-il chrétien ? S’il l’était, il était discret. Mais le Cardinal Duka, qui a présidé les funérailles de l’ancien chef d’Etat, a répondu pour nous . Havel était baptisé, il était chrétien. En prison, Havel avait été incarcéré avec Dominik Duka et Vaclav Maly. Le premier est aujourd’hui archevêque de Prague, le second évêque auxiliaire.

Un intellectuel engagé qui analyse la crise de sa société. Pour Havel, la crise commune aux sociétés de l’Est et de l’Ouest est d’ordre éthique parce qu’elle a sa racine dans le consentement au mensonge. Il ne s’agit pas du choix du faux pour le faux : il s’agit d’un mensonge « pragmatique », utile à court terme, susceptible de résultats tangibles, condition du maintien du confort.

Sous le régime communiste, on avait pris l’habitude de penser noir et de dire blanc. Pour se protéger. Ce consentement au mensonge a empoisonné les esprits. Tous étaient atteints. Aussi l’opposé de la « vie dans le mensonge », Havel l’appelle la « vie dans la vérité » : cela suppose de faire place à d’autres motifs que les motifs pragmatiques et, notamment, à se soucier de « faire le bien par principe, pour l’amour du bien ». On peut renvoyer à l’ouvrage de Jean Picq, Vaclav Havel, La force des sans-pouvoirs, Ed. Michalon, 128 p.

2012 : élections, transitions arabes, synode sur la nouvelle évangélisation, etc. Havel est une lumière que peut, si nous le voulons, continuer à nous éclairer.

Le monde est traversé par une immense aspiration à la dignité, une soif d’être respecté. Au Sud Soudan, un des slogans utilisé pour le référendum sur l’indépendance était : vote for dignity…votez pour que votre dignité soit respectée. Et ce slogan, me semble-t-il, exprime le mouvement qui s’est propagé dans les pays arabes.

Bien des analyses sont possibles pour les expliquer : Montée en puissance d’une classe moyenne, exaspération due à l’augmentation du prix des matières premières, existence du net et d’une chaîne de télévision arabe, Aljazeera, pouvoirs corrompus, inégalités énormes et privatisation de l’Etat au profit d’un clan ou d’une famille… Sécurité exacerbée…

Comment réagir, nous Français, à ce qui se passe ? Nous ne sommes pas propriétaires ni de la démocratie, ni de la liberté, et ce qui arrive là bas ne doit pas être récupéré en proclamant – avec arrogance – que les peuples découvrent nos valeurs. Il convient simplement de se réjouir de les voir suivre leur propre chemin.

Il serait déplacé d’encourager des mouvements et de ne pas leur donner la possibilité de s’imposer. Il y a déjà un certain temps, nous avions encouragés les Kurdes à la révolte et cette révolte avait été matée dans le sang par M. Saddam Hussein. Se réjouir….oui, mais savoir partager pour donner des moyens afin de tenir et d’aller de l’avant.

Notre arrogance serait déplacée si nous ne nous interrogeons pas sur nous-mêmes ! Dans notre pays et spécialement dans certains quartiers de la banlieue des hommes et des femmes, des adolescents ont l’impression que leur dignité est bafouée… Nous affichons : liberté, égalité, fraternité, et ils vivent leur quotidien en ayant l’impression que ce n’est pas pour eux. Ils croient constater que c’est l’argent (pas la fraternité) qui domine notre monde ! Et si certains sont tentés quelquefois d’obtenir de l’argent par la violence, ou la drogue la plupart vivent la grande frustration de ne pas être respecté.

Comment, chrétiens, ne pas entendre un tel appel à la dignité au respect c’est-à-dire à la justice et à l’espoir ? Dieu aime notre liberté…il nous fait confiance. Il nous soutient de son amitié. Comment, nous, ne pas faire de même ?

Au moment où à travers le monde on célèbre le 20e anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant de l’ONU ratifiée par pratiquement tous les pays et que l’on fait son bilan en mesurant tous les efforts qui restent à accomplir, c’est un message négatif qu’envoient les autorités françaises en prévoyant la suppression de l’institution nationale du Défenseur des enfants créée en 2000.

Selon les projets actuellement élaborés, sa mission et ses attributions seraient en partie transférées au futur Défenseur des droits prévu par la révision constitutionnelle de 2008.

Si tel était le cas, la défense des droits de l’enfant serait fortement diluée dans un mandat à facettes et fonctions multiples, et de fait serait très restreinte face aux cas et situations concrètes de violation. La visibilité, la spécificité et surtout l’efficacité du combat pour les droits de l’enfant en seraient d’autant compromises.

Or, cette perspective de suppression du Défenseur des droits de l’enfant va à l’encontre des engagements internationaux de la France et de ses responsabilités. Celle-ci va en particulier à contre sens :

  • de la recommandation du Comité des droits de l’enfant institué par la Convention de l’ONU qui demande à chaque Etat partie – dont la France – de prévoir une institution nationale indépendante spécialement compétente pour promouvoir et protéger les droits de l’enfant ;
  • de l’appel de l’Organisation Internationale de la Francophonie qui à l’occasion du 20e anniversaire de cette Convention, demande à tous ses Etats membres de redoubler d’efforts pour mettre en œuvre et garantir l’effectivité des droits de l’enfant ;
  • de l’évolution actuelle caractérisée par le développement d’institutions nationales spécifiques pour la promotion et la protection des droits de l’enfant dans un nombre croissant de pays des différentes régions du monde.

La suppression du Défenseur des enfants comme institution nationale autonome serait un véritable recul en premier pour les enfants eux-mêmes et leur « intérêt supérieur ». En outre, cette disparition donnerait un signal négatif aux autres Etats engagés dans la mise en place d’institutions de défense des enfants et finalement, elle susciterait une large désapprobation de la communauté internationale à la mesure de l’attente que l’on peut avoir de la France et au regard de sa responsabilité propre.