La joie de l’Evangile
Le Conseil national pour la solidarité des évêques de France vient de publier un livret pédagogique sur l’exhortation du pape François. Justice et Paix s’y est associé.
Cette nouvelle parution fait suite à celles sur l’encyclique L’Amour dans la vérité, sur les paradis fiscaux, les réfugiés et les migrants, la justice et la paix en Israël et Palestine. Un chapitre est relatif aux changements des « structures de péché » et à la tâche politique désignée comme la forme la plus élevée de la charité.
Il ne suffit pas de mettre en place des plans d’urgence pour les plus démunis. Il faut chercher des solutions pérennes donc structurelles. Il faut, certes, accueillir le démuni, lui faire toute sa place dans la société et l’Eglise mais il est encore plus important d’éradiquer la misère.
Développer une solidarité structurelle
La solidarité dans une société moderne et complexe ne peut se limiter à l’aumône donnée aux mendiants de nos rues. Pas même se limiter au chèque qu’on envoie aux associations humanitaires en fin d’année. Il s’agit d’envisager le « prochain structurel », celui auquel nous lient les mécanismes complexes de l’impôt, de l’économie mondiale, des cotisations sociales, du prix du pétrole…celui dont nous sommes solidaires par les décisions politiques qui façonnent l’ordre ou le désordre mondial actuel : « Tant que ne seront pas résolus radicalement les problèmes de la pauvreté…en attaquant les causes structurelles de l’inégalité sociale, les problèmes du monde ne seront pas résolus…L’inégalité sociale est la racine des maux de la société. »(202 de l’exhortation)
La question de l’amour du prochain, de la solidarité, de la lutte contre la misère, de l’accueil du démuni…ne se limite pas à un mouvement romantique du cœur. Il nous faut envisager les mécanismes économiques et politiques qui nous rendent solidaires de 65 millions de Français, de 500 millions d’Européens, et de 7 milliards d’habitants de la planète. Et cela passe aussi (surtout) par des mécanismes structurels, économiques, politiques, culturels. Changer de vie, adopter un style de vie sobre, cela pousse à un changement des structures de notre monde. L’économie, la vie internationale, l’ONU peut être. La vie de notre quartier aussi, pour commencer. Quartier ou immeuble ou famille ou bureau ou atelier.
Réhabiliter la dignité de la tache politique
La tâche politique – modifier les structures – est urgente. « La nécessité de résoudre les causes structurelles de la pauvreté ne peut attendre »(202). On peut ne pas limiter l’action des chrétiens aux relations interpersonnelles et estimer que le marché s’autorégule pour ce qui concerne les échanges de marchandises, de travail et de capitaux. Comme si le dynamisme chrétien ne devait se déployer que dans la sphère privée. « Nous ne pouvons plus avoir confiance dans les forces aveugles et dans la main invisible du marché…{il faut} des programmes, des mécanismes et des processus spécifiquement orientés vers une meilleure distribution des revenus, la création d’opportunités d’emplois, une promotion intégrale des pauvres qui dépasse le simple assistanat. »(204) Faire cela, c’est simplement exercer notre responsabilité politique de chrétiens : « La politique tant dénigrée est une vocation très noble, elle est une des formes les plus précieuses de la charité, parce qu’elle cherche le bien commun…Nous devons nous convaincre que la charité est le principe non seulement des micro-relations : rapports amicaux, familiaux, en petits groupes ; mais également des macro-relations : rapports sociaux, économiques, politiques. »(205)
Evangéliser, cela consiste donc aussi à humaniser nos conditions de vie et celles de nos contemporains. (…) « Dieu vit parmi les citoyens qui promeuvent la solidarité, la fraternité, le désir du bien, de vérité, de justice. Cette présence ne doit pas être fabriquée, mais découverte, dévoilée. »(71)