La dette, encore et toujours ? Regards éthiques [1]

par Fr Jean Claude Lavigne, op

Un des derniers messages du pape François a été de mettre la réduction, voire la suppression, de la dette internationale des pays pauvres au cœur du processus de libération pour que les peuples puissent espérer un avenir meilleur. Cette parole forte ne pouvait pas nous laisser indifférents et devait mobiliser nos réflexions pour que cela ne soit pas une parole lancée dans le désert mais un élément pour l’Espérance en action.

Pour ne pas rester dans les idées vagues, il nous a fallu d’abord faire comprendre ce qu’était cette dette, son évolution et les impacts de celle-ci sur les populations les plus fragilisées. Cet aspect diagnostic nous est vite apparu important mais pas le cœur du sujet pour Justice et Paix. La réflexion éthique et théologique devait être mobilisée pour stimuler les croyants à prendre au sérieux le message pontifical. Cette approche spécifique s’est révélée extrêmement riche pour dégager les grands pans de ce qui devait être annulé dans la dette : la dette insoutenable, la dette odieuse, la dette immorale et la dette écologique moins souvent évoquée. Le critère éthique au cœur de notre analyse était la souffrance des populations infligée à celles-ci qui n’ont ni voulu ni profité de l’endettement négocié par leurs élites ou les grands acteurs internationaux.

Cette approche ouvrait la piste à des propositions d’actions qui ne pouvaient pas être que techniques (car beaucoup ont déjà été tentées avec des succès mitigés et sans apporter de solutions durables) mais qu’elles devaient mobiliser les citoyens, la société civile, les Églises et en particulier l’Église catholique. Nous avons donc fait un inventaire de ce qui existait ou pouvait exister de manière assez concrète pour illustrer non sans provocation la prière du Notre Père : « Remets-nous nos dettes Seigneur comme nous les remettons à nos débiteurs et dans ce cycle de pardon, accorde-nous la paix. Cette paix que toi seul peut donner à ceux qui se laisseront désarmer le cœur, à ceux qui avec espérance veulent remettre leurs dettes à leurs frères, à ceux qui confessent sans crainte qu’ils sont tes débiteurs, à ceux qui ne restent pas sourds aux cris des plus pauvres. » (Pape François, 8/12/2024)

[1] La Dette, encore et toujours ? Regards éthiques. Les éditions du CERF – 156 p – 18 €