Alerte sur le Liban
Miné par les crises en cascade, voilà le Liban face à un défi existentiel. La crise économique est aiguë : la monnaie a perdu 80 % de sa valeur, la pauvreté affecte 55 % de la population, le taux de chômage est de 40 % et la fuite des capitaux vers l’étranger, depuis octobre 2019, est estimée à 9 milliards de dollars.
À ce jour, le Gouvernement présidé par Saad Hariri n’est toujours pas formé. Il est pourtant urgent d’entreprendre des réformes fiscales, financières, macroéconomiques et structurelles, et une restructuration de la dette publique et du système bancaire. Le système politique agonise. La classe dirigeante ne manifeste aucune volonté réformatrice.
Facteur aggravant, la crise sanitaire liée à la Covid-19 touche de nombreux foyers. Ces 4 dernières semaines, le nombre de décès a dépassé celui de l’année 2020. Les hôpitaux manquent de ressources. Les urgences sont saturées, les supermarchés fermés. Le confinement est l’un des plus stricts au monde. Les Libanais se soumettent à l’autorité d’un pouvoir qui a perdu toute légitimité.
Deux récents événements illustrent le déclin du Liban. Le 4 février 2021, le journaliste Luqman Slim, dissident intellectuel chiite et critique du Hezbollah, a été assassiné – un signe du recul des libertés d’expression et de la presse. Le 18 février 2021, chargé de l’enquête sur la double explosion du 4 août 2020 à Beyrouth, le Juge d’instruction Fadi Sawan a été limogé. Comment faire la lumière sur des crimes politiques, pour l’heure non élucidés et impunis ?
Peut-on tabler sur l’évolution politique régionale et internationale : la nouvelle administration américaine et les tractations avec l’Iran, une certaine normalisation des relations entre Israël et les pays du Golfe (portant moins d’intérêt au Liban qu’autrefois), les liens socio-culturels toujours importants entre la France et le Liban ? Une lueur d’espérance se profile-t-elle malgré tout ?
*Nayla Haddad, avocate aux barreaux de Paris et de Beyrouth