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Le titre est explicite : il s’agit bien d’un livre dérangeant qui s’en prend aux discours convenus, notamment aux tenants d’une écologie consensuelle. Un propos qui dénonce d’abord un affaissement du politique : le pouvoir effectif appartient à un petit nombre de décideurs économiques mondiaux indifférents à l’intérêt général. Il met en cause le récit occidental selon lequel le progrès technique oriente vers une fin ultime et radieuse. Mais cette vision illusoire ignore les problèmes majeurs que sont la montée des inégalités et le risque d’effondrement du vivant. La modernité soumise au marché se révèle sacrificielle et destructrice. En fait, la perspective d’un marché ouvert, rétif à toute régulation politique, constitue une menace pour notre humanité. Il en va de l’avenir des droits humains, notamment pour les plus fragiles, et de l’héritage démocratique qui implique la reconnaissance de tous par tous. Des analystes, par exemple Claude Lefort, ont bien mis au jour les ressorts de la tyrannie totalitaire, mais ils n’ont pas vu venir l’impérialisme du marché qui pousse l’irrationalité à son comble, au point de mettre en cause l’avenir de la vie sur terre. Quels moyens de résistance peuvent être mis en œuvre ? Une revalorisation de la liberté humaine, non comme un arbitraire individuel réduit à des choix de consommation, mais une liberté positive comme « détermination démocratique d’une société écologiste ». Il faut choisir : être citoyen ou client. Un dynamisme démocratique qui ravive le pouvoir de régulation relevant du politique, en vue de la justice sociale et d’une vie à venir possible. Le comble de la disqualification du politique apparaît
avec les traités commerciaux qui soumettent les États aux décisions de tribunaux d’arbitrage ; un signe que « les élites politiques et économiques partagent le même logiciel qui fait du marché le vrai maître ». Une volonté de réinscription de l’humain dans la nature, à partir de l’unité et de la solidarité du vivant. Ce qui suppose une approche spirituelle de la vie et l’invention de nouvelles formes démocratiques. On pourrait questionner l’auteur sur ses lectures de l’histoire longue et même de la préhistoire, mais il met bien le doigt sur les blocages idéologiques et structurels qui retardent la réorientation de nos modes de vie. Or, il s’agit d’une urgence vitale.