Les jeux olympiques et paralympiques 2024….

« On voudrait toutes et tous que ce soit une fête! » 

Les Jeux 2024 veulent créer plus de cohésion autour des valeurs partagées de l’olympisme. Et pour les organisateurs, Paris 2024 se veut, bien au-delà des Jeux, une opportunité économique, écologique, sociale, pour l’ensemble de la société qui pourrait profiter de l’héritage laissé par les Jeux. Malheureusement, même si le sport est facteur d’insertion, l’expérience montre que lors de tels événements certaines personnes, du fait de leur vulnérabilité, sont victimes d’exploitation ou de traite sous différentes formes : exploitation sexuelle, exploitation au travail, esclavage domestique, contrainte à commettre tout délit ou crime, obligation à mendier…

Geneviève Colas

Le Collectif « Ensemble contre la traite des êtres humains » coordonné par le Secours Catholique – Caritas France[1], avec ses 28 associations membres, dont Justice et Paix France, et leurs réseaux rassemblant des organisations de la société civile en France et à l’international, sensibilise le grand public et agit auprès des institutions afin de prévenir et lutter contre l’exploitation sous toutes ses formes, pour quatre raisons. C’est un phénomène d’ampleur alors que 4 363 victimes ont été repérées par les associations en 2022 (chiffre très en deçà de la réalité du fait de l’invisibilité du phénomène). Par ailleurs, la traite des êtres humains cause des traumatismes physiques comme psychologiques importants chez les victimes, celles-ci étant souvent exposées à des menaces et des agressions, des abus sexuels ou émotionnels, des privations de leurs besoins fondamentaux, des stratégies d’isolement et d’humiliation. Le phénomène a des effets néfastes pour la société et génère de la pauvreté. La traite crée des poches de délinquance et de criminalité et alimente des réseaux criminels qui peuvent constituer une menace pour la démocratie. Elle remet en cause des valeurs fondamentales. Et notamment dans le cadre de l’exploitation par le travail, elle représente un manque à gagner pour la collectivité. Aujourd’hui les politiques coercitives sont inefficaces : face à des réseaux qui exploitent des personnes pour commettre des délits la seule réponse répressive qui consiste à arrêter les « petites mains » ne suffit pas. Au contraire cela alimente le processus de traite car des jeunes qui agissent de manière contrainte ou sous emprise sont utilisés comme « fusibles » par les exploiteurs. À la veille des Jeux olympiques, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), saisie par un groupe trans-partisans de députés, a présenté récemment un « Avis sur la traite à des fins de contrainte à commettre tout crime ou délit ». La prévention auprès des victimes doit être amplifiée. De même les politiques de lutte contre la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle développées en France doivent disposer de davantage de moyens.

Une démarche centrée sur les droits des personnes victimes tout en luttant contre les trafiquants est à privilégier. Cela suppose en France une politique efficace de prévention et lutte contre l’exploitation et la traite des êtres humains, la création d’un mécanisme de référence pour l’identification et l’accompagnement des victimes, la sensibilisation de la société civile aux risques d’exploitation, une formation des professionnels. Durant les jeux olympiques et paralympiques il est nécessaire de garantir un accompagnement global des personnes victimes : prévoir des lieux aménagés et un accueil en différentes langues aux abords des lieux de compétitions sportives pour que les personnes victimes puissent être accompagnées et puissent porter plainte afin que la justice s’empare de la question. Toutes les victimes doivent être considérées comme telles et trouver l’appui nécessaire jusqu’à ce que justice soit passée (punition des trafiquants et indemnisation des victimes, quelle que soit leur nationalité, leur âge…).

[1]https://www.secours-catholique.org/sites/default/files/03-Documents/Plaidoyer%20JOP2024-Inte%CC%81gral.pdf