Populorum progressio : un texte d’avenir

Faut-il commémorer le quarantième anniversaire de l’encyclique de Paul VI populorum progressio sur le développement des peuples ? Certains en doutent au motif qu’en quarante ans le monde a beaucoup changé, ou bien que de toutes façons ce qui est ancien n’est plus valable.

Le monde a certes changé en quarante ans mais le rapport de niveau de vie entre les riches et les pauvres, lui, s’est accentué, ce qui suffirait à vouloir revisiter la lettre de Paul VI.

Une relecture attentive de celle-ci montre en tous cas que les principes évangéliques fondamentaux pour le développement des pauvres qui y sont énoncés, qui continuent à inspirer les pratiques de nombre d’ONG à défaut des aides publiques, esquissent les fondements d’une mondialisation alternative de justice et de paix. En portant l’accent sur le développement intégral des hommes plutôt que sur la seule croissance du produit matériel, en en faisant un devoir personnel et social, le Pape englobe aussi bien le développement des riches que celui des pauvres et insiste avec force sur une solidarité d’un montant significatif, indispensable à la paix autant qu’à la justice.

Depuis 1967 ce n’est pas cette mondialisation-là qui est apparue. Celle qui s’impose en ce moment est dominée par l’âpreté de la concurrence, l’obsession de la consommation, la cupidité des actionnaires. Cela suscite d’énormes souffrances dans les pays pauvres qui ne peuvent bénéficier des rapports de force et où les gens sont contraints de vivre en dessous du seuil d’humanité, ainsi que des détériorations de la qualité humaine dans les pays riches. Tout cela alimente des conflits et des guerres. La justice ne règne pas plus que la paix.

De plus en plus de responsables et de ces sages que sollicitait Paul VI posent une redoutable équation dont personne ne connaît la solution : comment conférer le minimum de dignité humaine à 9 milliards de personnes bientôt alors que le capital reproductible de la planète est déjà entamé et que les riches n’envisagent pas de sacrifier une croissance indéfinie du produit matériel ? Sans alternative résolue à cette idolâtrie de la croissance matérielle des pays riches nous nous dirigeons vers des conflits majeurs.

L’inspiration d’une mondialisation juste et pacifique contenue dans populorum progressio reste disponible comme alternative, une alternative qui rejoint la recherche « d’un autre monde possible » par les forums sociaux.

Cette lettre de Paul VI, non seulement n’est pas démodée, mais elle est actuelle et surtout elle s’inscrit dans une perspective d’avenir.