Les 60 ans de Pacem in terris
« C’est un fait reconnu que la paix sur terre, en tout temps désirée avidement par des hommes du monde entier, ne peut se fonder ni perdurer sans respecter scrupuleusement l’ordre établi par Dieu, l’établissement d’une paix universelle dans la vérité, la justice, la charité, la liberté »
Pacem in terris est une encyclique du pape Jean XXIII signée le 11 avril 1963. C’est une des plus célèbres encycliques du XXe siècle. Elle pose des principes repris ultérieurement, en premier lieu par Vatican II et ensuite par les encycliques du pape François, Laudato si’ et Fratelli tutti.
Pacem in terris est une première encyclique que le pape n’adresse pas aux seuls catholiques mais plutôt « à tous les hommes de bonne volonté ». En plein contexte de guerre froide, le pape explique que les conflits ne devraient pas être résolus par les armes, mais plutôt par la négociation. Il souligne l’importance du respect des droits de l’Homme comme conséquence essentielle de la compréhension chrétienne du respect de l’être humain. L’encyclique établit clairement que « … chaque homme a le droit à la vie, à l’intégrité physique et aux moyens de subsistance nécessaires à un développement de vie correcte. » (11).
Il est indéniable que le Saint pape Jean XXIII a apporté une contribution prophétique à l’analyse du monde de l’époque, de ses conflits, de ses espoirs. En rejoignant les soucis de l’humanité, et en l’occurrence le lien essentiel de la paix, l’Église s’est ouverte au monde et positionnée en défenseur de chaque personne humaine dans les grands combats du présent, efforts de développement sans lequel la paix est impossible, recherche des moyens de la paix, droits de l’Homme, indépendance des pays du Tiers Monde, combats qui connaissent un regain d’actualité aujourd’hui.
Aujourd’hui comme hier, Pacem in terris constitue une véritable synthèse sur laquelle pourrait s’appuyer à la fois les pourparlers et les organismes internationaux dans une recherche de solutions pacifiques aux nombreux conflits qui surgissent sur la planète. La pertinence de Pacem in terris repose sur des éléments incontournables, centralité de la personne humaine, sujet de droits et de devoirs, égalité et dignité inhérents de toutes les personnes sur terre, ordre moral fondé sur Dieu et requis des personnes, des pouvoirs politiques et des organisations internationales, développement intégral des personnes et des sociétés, ouverture et dialogue, vérité, solidarité, justice et liberté.
Le droit à émigrer est proclamé. « Tout homme a droit à la liberté de mouvement et de séjour à l’intérieur de la communauté politique dont il est citoyen ; il a aussi le droit, moyennant des motifs valables, de se rendre à l’étranger et de s’y fixer. Jamais, l’appartenance à telle ou telle communauté politique ne saurait empêcher qui que ce soit d’être membre de la famille humaine, citoyen de cette communauté universelle où tous les hommes sont rassemblés par des liens communs. » (25). Il s’agit donc d’un droit humain fondé sur l’idée de fraternité universelle. Dans Pacem in terris, le pape distingue trois traits qui caractérisent son époque, qu’il appelle « signes des temps » : la promotion économique et sociale des classes laborieuses, l’entrée de la femme dans la vie publique et plus de peuples dominateurs et de peuples dominés.
On peut dire que cette encyclique est une source d’inspiration pour le pape François dans sa volonté de souligner les problèmes majeurs que rencontre le monde d’aujourd’hui. Depuis son installation en 2013, il a appelé à plusieurs reprises à la paix, à la fin de toutes les guerres et des préparatifs de guerre, à la culture de la vérité et du dialogue, à la justice, à la solidarité et à la réconciliation qui sont le « mortier de l’édifice de la paix » (25/11/2019). Ce changement de paradigmes, le pape François nous y invite dans ses encycliques, dans ses déclarations, dans ses écrits et dans ses actions.
Pacem in terris est une clef contre le système vécu aux périphéries : le défi mondial aux individus et aux systèmes qui perpétuent la violence de l’Amazonie à l’Ukraine, le défi d’une approche d’une paix juste. La question qui est posée à notre monde : quelle réponse donner à des contextes de violence et d’injustices aigus, quel engagement envers la paix comme essentiel à tous ceux qui profitent des cultures de violence et la conversion des systèmes qui alimentent ces violences ?