Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

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Aucun des enjeux auxquels l’humanité doit faire face ne peut être réglé à l’intérieur de frontières nationales : respect des droits humains, partage équitable des richesses, lutte contre le dérèglement climatique.

Autant de sujets majeurs pour notre avenir, qui sont quasiment absents des programmes actuels des partis et des candidats à la veille des élections françaises de 2017. Face à cette situation, les politiques publiques – aux niveaux français, européen et international – ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Les citoyens en France et dans le monde, notamment les plus vulnérables, subissent de plein fouet ces crises et attendent des réponses. Des choix politiques et stratégiques fondamentaux s’offrent aux candidats. Parce qu’il est encore temps de le faire. Parce qu’il est temps d’agir.

L’urgence d’une mobilisation citoyenne

De nombreuses initiatives citoyennes voient le jour, au niveau local comme international, des alternatives sont proposées et nombre de nos concitoyens s’engagent pour une société plus juste, durable et solidaire. Si ces dynamiques montrent que d’autres modèles sont possibles et souhaités, ceux-ci restent encore trop peu considérés par les décideurs et les politiques publiques.
Pour « réveiller » nos responsables politiques, une mobilisation citoyenne forte est nécessaire.
Dans un contexte social, politique et sécuritaire tendu, quatre organisations non-gouvernementales (ActionAid – Peuples Solidaires, CCFD-Terre Solidaire, Oxfam France et Secours catholique-Caritas France) se sont alliées afin d’interpeller les acteurs politiques et d’apporter leur éclairage au débat public. Cette campagne « Prenons le parti de la solidarité » présente « Quinze propositions pour une France solidaire » articulées autour de trois grands axes liant écologie, économie et social : partager justement les richesses pour mettre fin à la pauvreté et aux inégalités, promouvoir la justice climatique et la souveraineté alimentaire et faire respecter les droits humains, en France comme dans les pays du Sud.

Partager justement les richesses pour mettre fin à la pauvreté et aux inégalités.

La France est le 3ème pays de l’OCDE où les inégalités ont le plus augmenté entre 2007 et 2013. Sur la scène internationale, les multinationales jouissent d’un pouvoir grandissant sans pour autant être tenues responsables des conséquences sociales et environnementales de leurs activités et sans avoir à respecter les droits humains. Mais un autre partage des richesses est possible. En encadrant et en régulant les activités du secteur privé, notamment celles des multinationales, en développant des politiques publiques justes et solidaires, l’Etat peut servir le bien commun.
Promouvoir la justice climatique et la souveraineté alimentaire
Nos modèles de production et de consommation n’évoluent pas assez vite pour maintenir le réchauffement climatique en -deçà des 1,5°C à l’horizon 2100. Notre addiction collective aux énergies fossiles reste démesurée, et les modèles de production agricole proposés pour répondre à la fois au défi de l’insécurité alimentaire et des changements climatiques sont inefficaces. La spéculation sur les matières premières agricoles, la promotion de l’agrobusiness et le libre-échange à tout va restent malheureusement privilégiés par les Etats. Il est impératif de s’engager dans une transition énergétique et agricole qui bénéficie notamment aux plus vulnérables.

Faire respecter les droits humains en France comme dans les pays du Sud

Les conflits, les violences terroristes, la répression, mais également une pauvreté endémique au Proche-Orient et en Afrique ont jeté sur les routes des millions de femmes et d’hommes : la plus grande crise de réfugiés depuis la Seconde Guerre mondiale. Les réponses qu’y apportent notamment les Etats européens sont insuffisantes, inefficaces et inhumaines. A l’intérieur de nos frontières, les droits des étrangers et les libertés fondamentales sont menacés, fréquemment bafoués et remis en question. L’accès aux droits humains et à la solidarité doit impérativement être au cœur de tous les engagements de la France et de l’Europe, qu’il s’agisse de politiques migratoires, économiques et commerciales ou de la lutte contre les discriminations.

Lors de la troisième édition de la Rencontre mondiale des mouvements populaires en novembre 2016 où je représentais Justice et Paix-France, le pape François a rappelé que « l’amour des pauvres est au cœur de l’Évangile » et que « une terre, un toit, un travail sont des droits sacrés »
Dans une société qui se recroqueville sur elle-même et perd le sens du collectif, osons promouvoir le vivre ensemble et appelons les candidats et l’opinion publique à prendre le parti de la solidarité !

La perspective d’un monde sans armes nucléaires bénéficie, au moins verbalement, d’un consensus international.

Dans son discours d’Istres de février 2015, le président François Hollande déclarait, par exemple, partager « l’objectif, à terme, de l’élimination totale des armes nucléaires … quand le contexte stratégique le permettra » tout en s’engageant à « agir sans relâche dans cette direction ».

Dans les faits, les puissances nucléaires repoussent cependant cet objectif à un horizon temporel indéfini. Pour le temps présent, c’est à une nouvelle course aux armements nucléaires que l’on assiste : les États-Unis, la Russie, la France, le Royaume-Uni et la Chine lui consacrent tous des sommes considérables. Il en va de même des autres possesseurs de l’arme (Inde, Pakistan, Israël). La Corée du Nord elle-même pourrait parvenir à se doter d’un armement nucléaire opérationnel. L’appel solennel à édifier un monde sans armes, nucléaires lancé en avril 2009 par le président Barack Obama, semble bien oublié.

Parallèlement, les négociations de désarmement marquent le pas : la dernière conférence d’examen du traité de non-prolifération s’est soldée par un échec, notamment en raison du refus occidental d’une conférence sur l’instauration d’une zone exempte d’armes de destruction massive au Moyen-Orient. Les discussions sur l’entrée en vigueur du traité d’interdiction complète des essais nucléaires et sur l’élaboration d’un traité d’interdiction de la production de matières fissiles à usage militaire sont dans l’impasse.
Cette situation, jointe à l’aggravation des tensions internationales, fait craindre un affaiblissement du « tabou nucléaire ». Qui peut garantir qu’une puissance dotée de l’arme nucléaire ne la mettra jamais en œuvre si elle perçoit une menace directe contre ses intérêts vitaux ?
C’est pour écarter l’éventualité d’une telle catastrophe humanitaire que l’Assemblée générale des Nations Unies vient de recommander à une très large majorité d’ouvrir, dès 2017, des négociations sur un traité de prohibition de l’arme nucléaire. Certes, les pays possesseurs de l’arme ont, jusqu’à présent, refusé cette initiative avec l’appui des alliés des États-Unis. Mais l’adoption par plus de 120 pays d’un instrument juridique déclarant illégale la possession de l’arme nucléaire n’en représentera pas moins un progrès considérable : par sa seule existence, cet instrument contraindra les puissances dotées à justifier en permanence les risques auxquels elles exposent le monde, tout en les incitant à garantir leur sécurité par d’autres moyens, moins périlleux pour la survie de l’humanité.

La dette des Etats, une arme à fragmentation

Le catéchisme de l’Eglise catholique rappelle : « La solidarité est nécessaire entre les nations dont les politiques sont déjà interdépendantes. Elle est encore plus indispensable lorsqu’il s’agit d’enrayer les  » mécanismes pervers  » qui font obstacle au développement des pays moins avancés. Il faut substituer à des systèmes financiers abusifs, sinon usuraires, à des relations commerciales iniques entre les nations, à la course aux armements, un effort commun pour mobiliser les ressources vers des objectifs de développement moral, culturel et économique en redéfinissant les priorités et les échelles des valeurs. »(2438)

Il y a donc une solidarité nécessaire entre les pays, ce qui implique de faire respecter les contrats de dettes mais aussi de faciliter les remboursements (négociation pour des rééchelonnements, prêts relais…). Le principe du remboursement d’une dette ne peut pas être bafoué de manière systématique, mais dans la perspective de Justice et Paix toutes les dettes n’ont pas la même valeur éthique. Certaines dettes sont odieuses et n’ont pas bénéficié aux plus démunis, alors que ce sont eux qui sont soumis à l’austérité et doivent payer les remboursements. Dénoncer la dette injuste est donc une attitude éthique au nom du développement au profit des plus pauvres (option préférentielle pour les pauvres).
Dans son Message pour la Journée mondiale de la Paix du 1er janvier 2016, le pape François appelle « à l’effacement ou à la gestion soutenable de la dette internationale des pays les plus pauvres. »