Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

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Les alertes apparues durant l’été deviennent des crises à la rentrée. Les réflexions proposées avec DIÈSE du mois d’août appellent quelques approfondissements en raison de l’actualité : des associations compétentes et solides ne peuvent plus faire face aux besoins sociaux élémentaires ; des solutions d’urgence sont envisagées, mais la question d’une réelle solidarité avec les plus fragiles d’entre nous demeure impérative. On reproche à certains de manquer à leurs devoirs envers la communauté nationale, mais celle-ci maintient une part de ses membres dans des conditions de vie indignes : arrêtons les hypocrisies, notre responsabilité sociale et politique se trouve bien engagée.

1– Aide alimentaire (suite) : que devient la solidarité ?
° Plusieurs associations, dont les resto du cœurs et la Croix rouge, viennent de tirer la sonnette d’alarme : soit elles refusent d’accueillir des personnes et des familles qui ne peuvent par elles-mêmes se nourrir correctement, soit elles diminuent la quantité de produits pour chacune. Les causes sont connues : la forte augmentation des prix de l’énergie et de la nourriture, la tension sur les revenus qui impacte l’ampleur des dons. La guerre en Ukraine joue un rôle important sur ces déséquilibres, ce qui nous rappelle que la justice et la paix doivent marcher la main dans la main. ° Il faut cependant redire avec force que dans un pays riche (la France), des gens ont faim, et on en vient à considérer cette situation comme normale ! Le nombre des enfants qui viennent de faire la rentrée scolaire mais qui dorment dans la rue continue d’augmenter.
° Heureusement, la générosité des citoyens et un engagement bénévole impressionnant apportent des solutions, au moins partielles, à ces dénis de justice sociale. La parole officielle oublie souvent d’honorer ces acteurs de premier plan de la vie citoyenne ; parfois les pouvoirs publics restreignent l’action des associations qui viennent en aide, par exemple aux migrants ; à plusieurs reprises le Secours Catholique a mis en cause des blocages de ses activités. Soulignons que l’aide n’est pas seulement matérielle, elle s’accompagne de relations humaines stimulantes. Cette dimension de générosité, de gratuité, d’humanité partagée est essentielle pour la vie commune, sinon il faudrait rayer le mot fraternité sur nos monuments publics.
° Le cri de détresse des associations a provoqué des promesses de don importantes. Tant mieux dans l’immédiat. L’argent ne manque donc pas dans notre société, mais on doit s’interroger sur l’affectation des ressources quand plusieurs millions de nos concitoyens n’ont pas accès aux biens les plus élémentaires. C’est une question politique, au sens noble du terme, qui mérite mieux que des postures électoralistes.
° Le problème ne se pose pas seulement à l’échelle de notre pays. Les mêmes causes produisent les mêmes effets à l’échelle internationale : le CCFD Terre solidaire note, à partir des données de la FAO, qu’1/3 de la population mondiale se trouve en insécurité alimentaire ; les remous politiques qui affectent des pays pauvres, sur fond de violences, ont souvent à voir avec l’impossibilité d’accéder aux biens vitaux. La justice sociale doit être pensée aussi à l’échelle mondiale, c’est une condition nécessaire pour la paix.

2– Religions et vie commune
° La référence religieuse peut être utilisée pour asseoir une autorité politique en lui donnant une aura sacrale : le critère religieux devient alors un élément central de discrimination à l’égard de certaines parties de la population. Nous en avons un exemple caricatural en Afghanistan, avec l’exclusion des femmes de la vie publique et l’interdiction de scolariser les filles ; ce qui cause des souffrances majeures et prive la société des apports positifs de certains de ses membres. Le pays le plus peuplé de notre monde, l’Inde, n’est pas exempt de ces discriminations à la fois religieuses et socio-ethniques, au détriment des musulmans mais aussi des chrétiens. Comme il s’agit d’un marché important, on préfère fermer les yeux ! Un autre pays proche du précédent, né d’une scission, le Pakistan, discrimine aussi largement les hindous et les chrétiens. Le fanatisme religieux légitimant des violences. (On peut consulter à ce sujet la Lettre de Justice et Paix du mois de septembre.)
° Des mots reviennent dans ces discours qui appellent à la haine et à la violence. Les groupes ethniques et religieux minoritaires sont considérés comme « impurs », ce qui légitime la discrimination, voire l’éradication. On sait combien le mythe de la pureté de la race a provoqué de crimes, demeurons donc vigilants quand il réapparaît subrepticement dans les débats politiques. Le mot «blasphème» (ce qui outrage le divin) se trouve plus d’une fois brandi pour légitimer des violences, tandis que d’autres revendiquent le «droit au blasphème» et le manifestent par exemple en brûlant le Coran. Un mot valise qui, par son imprécision, nourrit les tensions au lieu d’ouvrir au débat. Quant aux chrétiens, ils se souviennent que Jésus a été condamné à mort notamment pour cause de blasphème, il vaut mieux alors être prudent dans l’usage de ce terme !
° Au risque de passer pour un «bisounours», ce qui pour certains équivaut à la disqualification suprême, il vaut mieux promouvoir et pratiquer le respect mutuel, le goût de la rencontre, de l’échange et du débat contradictoire. Ce qui suppose que l’on résiste aux attitudes de mépris qui cherchent à humilier l’adversaire, aux actes violents qui se parent d’un sacré religieux ou laïque.

3- Se lamenter ou innover ?
À partir des années 1990 régnait un climat euphorique avec la fin de la guerre froide et une mondialisation heureuse sous le signe du doux commerce. On peut parler de naïvetés face aux nouvelles dominations : une finance sans frontière ne rêvant que de profits, faisant bon ménage avec des pouvoirs autoritaires. Aujourd’hui, le temps est plutôt à la peur (climat, guerres, pauvretés…) au risque de la paralysie. Mais il y a aussi des ferments de créativité tant en économie que dans la vie sociale. Associons donc lucidité critique et ouverture à l’avenir pour formuler des projets politiques cultivant le goût de vivre ensemble au sein de la famille humaine !

4- De la culture du déchet à la culture du soin !
Dans le cadre de Justice et Paix France, Dominique Coatanéa et André Talbot conduisent un travail sur ce thème. Selon le pape François, la « culture du déchet » concerne les biens matériels, mais aussi des humains laissés en marge de la vie commune.
Une soirée permettra de faire le point sur l’avancée des travaux, avec le témoignage d’acteurs de terrain qui promeuvent des alternatives positives face à ce défi.
Vendredi 6 octobre, de 18h à 19h45, Maison Saint-Hilaire, 36 Bd Anatole France, Poitiers.

 

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Si l’Église est ancrée dans l’histoire et la conscience universelles par la Révélation et l’Incarnation, dont elle a charge de témoignage, elle a aussi un statut de souveraineté qui la qualifie comme État parmi les États, fût-il le plus petit d’entre eux, avec le privilège de s’exprimer à l’égal des autres. La date de 754 et le don de Pépin le Bref à la papauté de territoires en Italie marquent l’origine de l’État pontifical. Plus proche est celle de 1929, avec les Accords du Latran, l’assise territoriale du Vatican et l’exercice d’une diplomatie de souveraineté que Pie XII, Jean XXIII et Paul VI, tous experts en la matière, s’employèrent à développer.

Le Saint-Siège n’a certes d’intérêts ni militaires, ni économiques, ni vraiment consulaires ou culturels, ni même, en réalité, politiques. Mais il a une voix qui se doit d’être audible. Selon la Secrétairerie d’État, les constantes de la diplomatie vaticane sont : le respect dû à l’Homme (aujourd’hui : le « développement humain intégral »), l’action en faveur de la paix, la défense de la liberté religieuse, celle des communautés chrétiennes (Proche-Orient, Asie…), la médiation qui atténue les tensions, une intervention engagée lorsqu’il existe un risque de fractionnement des communautés catholiques locales (Venezuela, Nicaragua, Chine, Soudan du Sud…). Sans oublier le multilatéralisme : le Saint-Siège ne néglige aucune tribune onusienne, cadre choisi par François pour trois priorités fortes : le désarmement nucléaire, la protection de l’environnement, la lutte contre l’exclusion économique et sociale – une quatrième, l’accueil des migrants, étant davantage traitée sous l’angle pastoral du fait de l’impasse des voies politiques.

Le Pape exprime ces messages en toutes opportunités : audiences, voyages officiels, appels téléphoniques, encycliques, messages délivrés en public place Saint-Pierre, conférences… Mais sa tâche repose sur un personnel de haute qualification, formé à l’Académie pontificale ecclésiastique : à la Secrétairerie d’État (donc très proche du Pape), la Deuxième Section pour les relations avec les États ; sur le terrain, un réseau de nonciatures auprès des quelque 180 États ayant noué des relations officielles (dernier en date : Oman).

Parmi les 21 nouveaux cardinaux créés ce 30 septembre 2023, deux sont nonces en exercice, Mgr Tscherrig, suisse, et Mgr Pierre, français. Ils rejoignent Mgr Zenari, nonce en Syrie, créé cardinal en 2016.

S’il était de tradition, jadis, que les nonces entrent au collège cardinalice en fin de carrière, la remise de la barrette pourpre à des ambassadeurs en exercice est rare. Au-delà des qualités personnelles, et, d’un même mouvement, du geste à l’égard des Églises de Suisse et de France (leur nombre d’électeurs passe d’un à deux et de quatre à six), c’est l’attention portée aux pays d’accréditation qui est commentée. En 2016, François l’avait dit : il pensait à la Syrie meurtrie, dont les chrétiens étaient pris dans une tourmente emportant tous les repères ; message de compassion mais aussi de présence, alors que bien des pays avaient fermé leur ambassade à Damas.

Qu’en est-il avec Mgr Tscherrig, nonce en Italie (et à Saint-Marin) depuis six ans, et Mgr Pierre, nonce aux États-Unis depuis sept ans ? Si tous deux ont servi auparavant en Amérique Latine, respectivement en Argentine et au Mexique, il y a surtout que l’Italie et les États-Unis sont les deux pays comptant le plus de cardinaux électeurs, et que ces deux « puissances » du catholicisme illustrent le questionnement d’une Église universelle prise entre tradition et modernité. Tout en veillant à mettre en lumière les « périphéries » – jusqu’en Mongolie… –, François ne reconnaît-t-il pas par ces nominations tout le poids des grands contingents du catholicisme mondial ?

On sait le rôle discret, secret, que jouent les nonces dans l’identification des futurs évêques, leur présence auprès des conférences épiscopales locales, les visites aux évêchés et aux paroisses, leur engagement dans des médiations risquées, leur rôle dans la préparation des voyages pontificaux ou des visites ad limina ; on a moins conscience de ce qu’ils inscrivent leur action dans le quotidien de la vie diplomatique, jusque dans ses moindres détails : ceux qui, comme en France, bénéficient de la tradition du décanat, représentent souvent leurs collègues ambassadeurs en des circonstances où l’ensemble du corps diplomatique ne peut être invité et ont plus souvent accès aux hautes autorités locales ; en contrepartie, à eux reviennent des tâches ancillaires, comme la négociation auprès du Protocole du nombre de places de parking CD devant les chancelleries et résidences de leurs collègues…

Dans l’attente de ce qui sera dit le 30 septembre, voyons en cette décision du Pape une vraie reconnaissance adressée à « ses » nonces et un soutien à leur action de valorisation de ses messages auprès des États du monde.

 

Mosaïque d’espérance
À l’initiative de la Conférence épiscopale italienne, un processus de communion entre les diocèses riverains de la Méditerranée a été engagé à Bari en 2020. Ce processus s’inscrit dans l’esprit des voyages méditerranéens du pape François qui, de Lampedusa (2013) à Marseille (2023), en passant par Tirana, Le Caire, Jérusalem, Chypre, Rabat, Naples, Malte, etc. s’est toujours engagé à faire de cette mer un message d’espérance pour tous. En Méditerranée, en effet, se rejoignent trois continents et c’est sur ses cinq rives (Afrique du Nord, Proche Orient, Mer Noire et Mer Egée, Balkans, Europe) que sont nées les trois grandes religions monothéistes et que se sont développés tant d’échanges mais aussi tant de conflits.

Après Bari (2020), puis Florence (2022), Marseille est donc la troisième étape de cette réflexion. Comme les deux rencontres précédentes, elle réunira des évêques catholiques et des représentants d’autres Églises sur les défis du pourtour méditerranéen, défis communs à tous nos diocèses, mais vécus différemment en raison de contextes locaux très divers. Alors qu’à Florence, des maires d’une soixantaine de villes méditerranéennes avaient été invités, en hommage à Giorgio La Pira, ancien maire de Florence et très engagé en faveur de la paix et du dialogue interreligieux, à Marseille, ce sont des jeunes de toutes religions et confessions qui sont conviés pour s’associer au travail des évêques.

Les rencontres méditerranéennes de Marseille, c’est bien sûr la messe avec le pape François, les assemblées des évêques et des jeunes, le Festival… mais tout cela n’a de sens, selon le cardinal Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille, que dans une perspective spirituelle.

« L’objectif des Rencontres méditerranéennes est de favoriser la communion entre les Églises du pourtour méditerranéen pour essayer d’apporter, ensemble et avec tous les acteurs civils, une contribution aux problématiques de cette région.

L’Église le fait parce que sa mission est d’être au service de la relation de Dieu avec le monde et de travailler à l’unité du genre humain. Car pour elle, tout homme, toute femme, est un frère, une sœur, pour qui le Christ est mort.

La Méditerranée, qui nous est commune, est entourée de peuples constituant une mosaïque : l’Afrique du Nord, le Proche Orient, la zone autour de la mer Noire, les Balkans et l’Europe Latine. C’est cette mosaïque que nous voulons essayer de réunir, en voyant comment chacun peut apporter sa part. Et si nous arrivons à faire en sorte que cette mosaïque méditerranéenne soit animée de l’espérance que nous puisons dans l’Évangile, ce serait un très beau message pour la Méditerranée, pour la France et pour le monde.

Le Pape François a commencé son pontificat par un premier voyage à Lampedusa. Ensuite il a égrené un chapelet de villes de la Méditerranée, un pèlerinage méditerranéen, dont Marseille sera une étape. Bien sûr, nous mettons toutes nos forces pour que cette étape soit réussie. Mais le plus important, c’est notre disponibilité à servir ce que Dieu voudrait donner à la fois aux peuples de la Méditerranée, au diocèse et à la ville de Marseille qui se trouvent dans leur vocation première d’être un pont entre le Nord et le Sud, entre l’Orient et l’Occident, et aussi à l’Église de France.

Cet événement nous dépasse et nous requiert. Du point de vue évangélique, c’est un signe. Il nous dépasse, car on ne sait pas ce que l’Esprit Saint fera avec tout ça. Et il nous requiert, parce que nous devons travailler pour faciliter le travail de l’Esprit et pour coopérer avec Lui ! L’enjeu est spirituel et ces rencontres méditerranéennes vont être portées par la prière, à laquelle tous ceux et toutes celles qui le voudront pourront se joindre pour disposer nos cœurs à accueillir ce que Dieu veut nous donner. »

Lors de la messe du vœu des Échevins du vendredi 16 juin 2023 à la basilique du Sacré-Cœur, le cardinal Jean-Marc Aveline est revenu sur les rencontres méditerranéennes.

« L’année dernière pour fêter dignement le troisième centenaire du vœu des Échevins, nous avons accueilli à la Vieille Major, le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d’État du Saint-Siège… le cardinal inspiré sans doute par la beauté du site, s’était laissé emporter dans une envolée tant historique que mystique, qu’il me semble important de relire avec vous ce matin, parce qu’elle nous replonge dans la vocation de notre ville et de notre Église. Il disait :
« D’ici (c’est-à-dire de la colline de la Garde), nous voyons en esprit les bateaux amener de la Grèce antique ces Phocéens qui furent accueillis par la population locale au septième siècle avant Jésus Christ. Le récit du mariage de la fille du roi celte avec le marin grec venu de loin nous rappelle que la naissance de la ville de Marseille s’inscrit dans la qualité d’un accueil qui n’a pas craint la rencontre de cultures différentes.

Si nous continuons de scruter la mer nous voyons arriver ces disciples de Jésus que vous aimez honorer. Ils vous ont apporté la foi dans les tout débuts du christianisme. Marseille est alors devenue une communauté de martyrs, de saints, de moines, de théologiens… Dès le début, les chrétiens ont remonté le Rhône faisant de Marseille une base de départ pour l’annonce de l’Évangile. Ensuite combien de bateaux sont partis du port de Marseille pour emporter des missionnaires en Afrique et en Asie. Assurément pour ces raisons et pour bien d’autres encore, la ville mérite sa devise : « elle resplendit par ses hauts faits ».

C’était l’année dernière pour la fête du Sacré-Cœur et voici que, s’il plaît à Dieu, [nous allons recevoir] le Pape François…

Trois événements en un !        

Le premier, une rencontre des évêques de la Méditerranée. Je le mets en premier car c’est d’abord à cause de cela que le Pape vient. Ces évêques seront environ soixante-dix provenant entre autres de Barcelone, Rabat, Alger, Tunis, du patriarcat copte catholique d’Égypte, des évêques du Liban, de Syrie, d’Irak, dont le patriarche de l’Église catholique chaldéenne. Il y aura aussi un évêque de Turquie, un de Roumanie, un autre de Bulgarie, l’évêque latin d’Odessa, ville avec laquelle Marseille est jumelée, un de Géorgie, et un d’Arménie, l’archevêque d’Athènes, un évêque du Monténégro, un d’Albanie, l’archevêque de Belgrade, celui de Ljubljana et bien sûr des évêques d’Italie et ceux des départements de France riverains de la Méditerranée. Ils seront là du mercredi 20 au dimanche 24 septembre, et le jeudi soir ils se répartiront dans vingt-six paroisses de notre diocèse, à la rencontre des communautés et des habitants.

Le deuxième, c’est une rencontre d’étudiants et de jeunes professionnels de tous les pays méditerranéens. Ils seront environ soixante-dix eux aussi, arriveront dès le dimanche 17 et passeront toute cette semaine à Marseille, travaillant en fin de semaine avec les évêques afin de préparer l’échange avec le Saint Père le samedi matin. Ces jeunes sont de toutes nationalités et de toutes confessions et religions. Il y aura par exemple, des Israéliens et des Palestiniens, des Turcs et des Grecs, des Marocains et des Algériens, des catholiques, des orthodoxes et des protestants, des juifs et des musulmans. Tous ont accepté de travailler ensemble sur les grands défis de l’espace méditerranéen, le défi socio-économique, le défi environnemental et climatique, le défi migratoire, si dramatique encore ces jours-ci, et le défi géo-politico-religieux. Et tous ont à cœur, face à ces défis, de recueillir les immenses ressources de culture, de sagesse, d’art de vivre ensemble et de spiritualité, que les peuples de la Méditerranée ont aussi forgées au fil de leur histoire. Tout cela sera accompagné d’un grand festival méditerranéen, à la fois culturel et spirituel, afin de permettre à tous de participer à ces rencontres.

Le troisième, c’est la venue du pape dans la journée du samedi 23. Il y a dix ans, au tout début de son pontificat, le Pape François avait choisi d’effectuer son premier voyage apostolique en se rendant à Lampedusa. Puis de Rabat à Tirana en passant par Malte et Lesbos, il n’a cessé de poursuivre ce pèlerinage méditerranéen, alertant sur les situations où la dignité de la personne humaine est bafouée et où le tissu de la famille humaine est fragilisé. Quand je l’ai invité à Marseille, je ne lui ai pas caché les difficultés que nous traversons, notamment la disparité économique entre les quartiers de la ville, avec les répercussions de la pauvreté sur l’éducation des enfants et des jeunes, sur la santé des habitants et sur leur sécurité. Je ne lui ai pas caché la prégnance de plus en plus forte des réseaux de la drogue et d’une circulation d’armes qui rend la situation encore plus violente et dangereuse, surtout pour les plus jeunes. Je lui ai parlé des difficultés que nous rencontrons pour l’accueil des personnes migrantes ou réfugiées, difficultés d’autant plus fortes que le taux de chômage est déjà très élevé chez nous. Je lui ai dit tout cela et également tout ce que nous essayons de réaliser pour relever ces défis, tous ensemble, responsables politiques et religieux, acteurs économiques et commerciaux, magistrats et militaires, enseignants et soignants, gendarmes, policiers et pompiers, et tant d’autres corps de métier appelés à coopérer sur le chantier de cette ville que nous aimons tant. Le pape m’a écouté et j’ai senti qu’il commençait à nous aimer.

Alors ce matin, afin de nous préparer le cœur pour accompagner le Pape dans l’étape marseillaise de son pèlerinage méditerranéen, méditons ces quelques phrases entendues tout à l’heure : « Si le Seigneur s’est attaché à vous, s’Il vous a choisis… c’est par amour pour vous », « Dieu est amour, qui demeure dans l’amour demeure en Dieu et Dieu demeurera en Lui » ; « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos ». Vous le voyez, il s’agit surtout d’humilité, d’amour et de confiance.

Marseille, toi qui fus la première ville au monde consacrée au Sacré-Cœur… cultive entre tous ceux qui habitent ici le respect et la fraternité. Marseille, toi qui as reçu l’Évangile par la mer, porté par ceux qui étaient désignés comme des amis du Christ, Lazare et Marie Magdeleine, des gens humbles que la vie avait malmenés, n’oublie pas que l’amitié est le terreau premier de l’Évangile et que la simplicité est le meilleur vecteur de l’Espérance. Église de Marseille, toi qui vis grandir tant et tant de saints, prends soin de chacun de tes enfants d’aujourd’hui. Protège leur soif de vérité, encourage leur désir de servir les plus pauvres et aide-les à offrir à tous l’espérance de l’Évangile. Alors tu verras, s’il plaît à Dieu, le Pape lui aussi, en ce samedi 23 septembre, sera fier d’être Marseillais. »

« Dieu notre Père, source de toute espérance,
Alors que notre Église de Marseille se prépare à accueillir des jeunes et des évêques venant de tous les rivages de la Méditerranée, nous nous tournons vers Toi pour t’adresser notre prière…/…

Que les « amis du Christ », saint Lazare, sainte Marie-Madeleine, sainte Marthe et les saintes Maries qui, depuis la Terre Sainte ont apporté la Bonne Nouvelle par la mer, à Marseille, en Provence et dans tout notre pays, nous aident à accueillir, vivre et annoncer le Bel Évangile de l’amitié et de la miséricorde, l’Évangile du Ressuscité qui a donné sa vie pour le salut du monde.
Que la Vierge Marie Étoile de la mer, vénérée sur tous les rivages de la Méditerranée, veille sur chacun de tes enfants, comme elle a veillé sur Ton Fils Jésus. Qu’elle prenne tout particulièrement soin de ceux qui, fuyant la misère ou la guerre, affrontent les périls de la mer, sans toujours trouver les secours dont ils auraient besoin…/…

Amen »