Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

Télécharger la Lettre n°304 septembre 2024  (PDF)   

Ce sont quelques lettres noires, minuscules, gribouillées sur des billets de banque. Dans les magasins de Moscou, les caissières et leurs clients n’y font même pas attention. Mais le message est plus que subliminal : « Non à la guerre ». Ces dernières semaines, de simples citoyens opposés à ce que le Kremlin nomme dans une litote depuis le 24 février son « opération militaire spéciale » en Ukraine expriment ainsi leur opinion face à la propagande militaro-politique de Vladimir Poutine. Le chef du Kremlin et ses télévisions font bloc pour souder la Russie, surtout depuis le tonitruant discours présidentiel à la télévision mercredi 21 septembre, soutenant les référendums d’annexion dans les régions de l’Est ukrainien sous son contrôle, décrétant la « mobilisation partielle » et menaçant d’utiliser contre l’Ouest « tous les moyens à notre disposition », y compris… nucléaire.

Minoritaires mais très diverses, des résistances surgissent ainsi bel et bien en Russie, tels ces billets bancaires, anonymes mais passant de mains en mains. La rébellion au Kremlin et à son « opération » prend de nouvelles formes inattendues. Certains nouent, ici et là en ville, de discrets petits rubans verts, devenus le symbole des « anti ». D’autres, sur leurs graffitis ou affichettes, optent pour des messages plus ou moins indirects (« pour la paix », « pourquoi ? ») ou dessinent une goutte de sang, celui des soldats au front et des victimes civiles. D’autres encore, sur un mur, ont mis une croix gammée face au « Z », le symbole des « pour ». Une manière d’inverser le narratif de la propagande qui présente l’offensive militaire en lutte contre « le régime néo-fasciste de Kiev ». Ces initiatives peuvent toutefois tomber sous le coup de la nouvelle loi qui menace de poursuites judiciaires, avec jusqu’à quinze ans de prison, toute personne « discréditant » l’armée et répandant de « fausses » informations militaires.

Portrait-types de cette nouvelle Russie qui, libérale, s’oppose depuis longtemps au Kremlin de Vladimir Poutine sans forcément participer aux manifestations de rue, ces anonymes sont rejoints par quelques figures célèbres. Alla Pougatcheva, 73 ans, reine de la musique pop soviétique, probablement la femme la plus célèbre du pays, vient ainsi de dénoncer publiquement l’offensive en Ukraine et regretter que la Russie devienne un « paria ». Face aux discours nationalistes, elle se déclare « patriote » qui veut un pays prospère, la paix, la liberté et la « fin de la mort de nos garçons pour des objectifs illusoires ». Le message est clair.

Minoritaire, cette opposition libérale est largement discréditée car présentée en cinquième colonne de l’Occident. Mais, parallèlement ces dernières semaines, sont montées les voix des faucons nationalistes qui, reprochant au Kremlin d’être trop faible, exigeaient depuis des semaines plus de radicalisation. C’est sous cette pression que Vladimir Poutine s’est résolu à ce qu’il avait voulu éviter jusque-là : la mobilisation militaire. Ces pressions nationalistes sont vues comme légitimes par une population gavée depuis des années de discours patriotiques. Enrobée dans le discours occidental, la mobilisation militaire devrait du coup être accueillie sans heurt par les Russes. D’autant plus qu’elle reste partielle. Et sans les contraintes d’une loi martiale.

Au lendemain des succès de l’armée de Kiev, Vladimir Poutine s’est en effet retrouvé dans la situation qu’il déteste le plus : décider sous la pression, dos au mur. Le chef du Kremlin, qui n’aime pas agir en réaction aux initiatives adverses, en politique intérieure comme sur la scène mondiale, a été bousculé sur tous les fronts. Militaire, diplomatique et politique à Moscou même. En guise de réponse, il a donc choisi la fuite en avant et a clairement fait passer le message : la Russie ne combat plus tant l’Ukraine que l’Ouest. Dans sa tonitruante allocution télévisée du 21 septembre, diatribe anti-occidentale au ton martial, il a présenté la nation en victime, habituel raccourci du Kremlin pour gagner le cœur et le soutien du public : « L’objectif de l’Occident est de détruire la Russie », a-t-il lancé, accusant l’Otan de « dépasser toutes les limites dans sa politique agressive ». Cette rhétorique, répétée depuis des mois par les télévisions au service du Kremlin, est désormais relancée pour briser la lassitude, voire la sourde frustration, qui gagnait la population devant l’enlisement militaire. Et, alors que l’armée russe vient de lancer des « frappes massives » sur tous les fronts en représailles à la contre-offensive ukrainienne, les plus farouches appellent déjà le Kremlin à sortir l’arme fatale : l’option nucléaire.

 

Discussions entre jeunes, experts et activistes sur

  • L’impact des essais nucléaires français dans le Pacifique,
  • L’extraction de l’uranium au Congo,
  • Le mouvement anti-nucléaire civil et militaire,
  • L’interdiction des armes nucléaires.

[Inscription : https://urlz.fr/jbcG]

Co-organisé par Justice et Paix France, Pax Christi International (dont Mgr Stenger est co-président), Pax Christi France et l’ICAN France (campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires).

« Les 12 750 armes nucléaires réparties à travers la planète peuvent mettre en péril, en quelques instants, les générations actuelles et futures. Si l’opinion publique et les jeunes en particulier ont conscience des dangers du dérèglement climatique et agissent activement pour le combattre, leur prise de conscience sur la nécessité de combattre aussi les armes de destruction massive apparaît moins évidente. La sensation d’un combat trop complexe ou encore du « David » contre « les Goliath nucléaires » apparaît pour beaucoup comme une des raisons principales du manque d’investissement. » (extrait de la note de présentation).

Ce webinaire, autour de témoignages de jeunes engagés et d’experts veut démontrer le contraire et ouvrir une nouvelle réflexion sur comment engager la jeunesse, les moyens d’actions possibles pour ensemble avancer vers un monde plus durable et plus pacifié.

Les intervenants sont :

  • Hinamoeura Cross, jeune polynésienne activiste qui milite pour éduquer sur la reconnaissance de l’impact des essais nucléaires français dans le Pacifique et pour « dénucléariser les mémoires »
  • Marhegane Godefroid Mulanga-Byuma, de la République Démocratique du Congo, spécialiste de l’extraction de l’uranium au Congo et leader ayant permis la décision de la ratification de son pays au TIAN
  • Yuki Takahata, journaliste japonaise vivant à Paris et activiste anti-nucléaire tant civile que militaire
  • Jean-Marie Collin, Expert et co-porte-parole de ICAN France

Télécharger  l’affiche 21 septembre 2022

Déclaration du Comité exécutif de Justice & Paix Europe sur les résultats des récentes conférences des Nations Unies sur le désarmement nucléaire

Avec la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine et ses conséquences, le monde semble avoir régressé dans une nouvelle dynamique de guerre froide, impliquant une rhétorique dangereuse avec des menaces d’utilisation d’armes nucléaires. L’érosion du respect des principes du droit international, y compris des accords de contrôle des armes, mine la confiance au sein de la communauté internationale. Si l’on ajoute la rivalité stratégique renouvelée entre les puissances nucléaires et l’évolution des technologies, cela rend très réel le scénario d’une explosion nucléaire intentionnelle ou accidentelle.

Dans ce contexte, l’humanité s’est tournée avec espoir vers deux importantes conférences internationales sur le désarmement nucléaire : la première réunion des États parties au traité sur l’interdiction des armes nucléaires (21-23 juin 2022) et la 10ème conférence d’examen des états parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (1-26 août 2022).

La première réunion des États parties au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) – le premier accord international juridiquement contraignant visant à interdire totalement les armes nucléaires – a semé quelques graines d’espoir. Dans la Déclaration Finale et le Plan d’Action de Vienne en 50 points, les États parties ont réitéré leur engagement ferme en faveur d’un monde exempt d’armes nucléaires. Ils ont exposé des mesures concrètes pour mettre en œuvre cette vision, en complémentarité avec les autres instruments de l’architecture mondiale de désarmement et de non-prolifération nucléaires. Tout en s’appuyant officiellement sur la doctrine de la « dissuasion nucléaire », plusieurs pays ont fait preuve de bonne volonté en participant à la conférence en tant qu’observateurs. Pourtant, aucune des puissances nucléaires n’a déclaré adhérer à ses résultats. Malheureusement, l’Union européenne n’a pas non plus été en mesure de trouver une unité pour formuler une position positive à l’égard de ce principal instrument juridique fortement inspiré par des considérations éthiques et humanitaires.

Malgré les propos alarmants du secrétaire général des Nations unies, António Guterres, à l’ouverture de la 10ème Conférence d’examen du TNP, selon laquelle « l’humanité n’est qu’à un malentendu, à une erreur de calcul de l’anéantissement nucléaire », les participants à la Conférence n’ont pas pu s’entendre sur un document final en raison des objections de la Fédération de Russie. Après l’échec de la dernière conférence d’examen du TNP en 2015, qui n’avait pas permis de parvenir à un consensus, cela constitue une évolution très décevante et inquiétante pour le cadre mondial de contrôle des armements, particulièrement dans le contexte géopolitique actuel qui appelle plutôt à la désescalade, à la stabilisation, au dialogue et à la coopération constructive en vue de rétablir progressivement la confiance qui a été gravement ébranlée.

Dans la ligne de l’engagement de longue date du Saint-Siège en faveur du désarmement nucléaire, le pape François a qualifié à plusieurs reprises d’’immorale’ non seulement l’utilisation, mais aussi la simple possession de l’arme nucléaire, car « tenter de défendre et d’assurer la stabilité et la paix par un faux sentiment de sécurité et un ‘équilibre de la terreur’, soutenus par une mentalité de peur et de méfiance finit inévitablement par empoisonner les relations entre les peuples et par faire obstacle à toute forme possible de dialogue réel. »

En tant que Justice et Paix Europe, nous souscrivons pleinement aux propos du Saint Père et souhaitons rappeler ce qu’il a déclaré juste avant le lancement des deux conférences de désarmement de l’ONU

Télécharger le texte en anglais  JPE Statement on UN nuclear disarmament conferences (PDF)