Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

Télécharger la Lettre n°304 septembre 2024  (PDF)   

« La traite des personnes est un crime contre l’humanité. Nous devons unir nos forces pour libérer les victimes et arrêter ce crime de plus en plus agressif (…) » ; dès le début de son pontificat, le pape François a exhorté les personnes de bonne volonté à combattre l’esclavage, à prendre en charge les victimes.

Depuis le 8 février 2015, fête de Joséphine Bakhita, esclave soudanaise, libérée, devenue religieuse, a lieu la Journée internationale de prière et d’action contre la traite des personnes.

« Une migration sans traite des êtres humains : Oui à la liberté ! Non à l’esclavage ! ». La journée mondiale du 8 février 2018 se focalise sur la traite des personnes en déplacement : migrants, réfugiés et déplacés. Dans le monde globalisé, crises humanitaires, catastrophes naturelles, conflits, violations des droits de l’homme provoquent d’importants flux migratoires, qui détruisent les structures communautaires et fragilisent les cellules familiales, exposant à tous les dangers les enfants et les plus vulnérables.

Une protection des migrantes insuffisante…

Le trafic des migrants et la traite des personnes sont des réalités différentes, mais interconnectées. Sans ressources, ni documents réguliers, liés souvent par une dette contractée pour le voyage, migrants et réfugiés cherchent des solutions de survie. Leur extrême précarité les rend vulnérables à toute forme d’exploitation.

Trop souvent, les politiques privilégient l’aspect sécuritaire, s’intéressant plus aux trafiquants qu’aux victimes. Les flux migratoires augmentent ; de nombreux pays développent des politiques de migration restrictives augmentant la vulnérabilité des personnes en déplacement et fournissant une protection inadéquate des migrants en général, des mineurs en particulier.

Les familles et les personnes vulnérables, les mineurs, sont la cible des trafiquants d’êtres humains. Promettant travail ou formation, ils vont en fait les exploiter : travail forcé, exploitation sexuelle, mendicité, crimes, trafic d’organes, mariage forcé ou servile.

Le cas des mineurs non accompagnés

Les mineurs non accompagnés ou isolés courent un risque accru, au long de leur voyage, dans des camps surpeuplés et en arrivant en Europe. Beaucoup disparaissent. Certains sont retenus en captivité pour être échangés contre rançon. Les réseaux les plus organisés disposent parfois « d’équipes » dans différents pays. Cela renforce la vulnérabilité des enfants : les liens positifs qu’ils peuvent tisser dans un pays, via les associations notamment, se délitent au fur et à mesure des mouvements.

« Protéger [nos] frères et sœurs [migrants] est un impératif moral à traduire en adoptant des instruments juridiques, internationaux et nationaux, clairs et pertinents […], en mettant en œuvre des programmes opportuns et humanisants dans la lutte contre les trafiquants de chair humaine qui font du profit sur les malheurs d’autrui » a dit le pape François, lors du forum international « Migrations et paix », le 21 février 2017.

En juin 2017, le Secours Catholique, ses partenaires et son réseau international ont présenté au Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU des propositions pour lutter contre la traite des enfants : sensibiliser à ces phénomènes « cachés », protéger les enfants à risque, aider les victimes à se reconstruire, établir un statut de victime sans criminalisation des enfants, donner un représentant légal pour chaque enfant, permettre l’accès à des interprètes, développer des formations sur la traite des enfants pour professionnels et bénévoles, ouvrir les politiques d’immigration.

Un document conjoint élaboré

En décembre 2017, à l’occasion de l’Examen Périodique Universel de la France, Justice et Paix – membre du Collectif « Ensemble contre la traite des êtres humains » coordonné par le Secours Catholique –  a contribué à l’élaboration d’un document de positionnement sur la façon dont la France considère les droits de l’homme en matière de traite des êtres humains et sur les mineurs non accompagnés.

Le 11 janvier 2018, une journée de formation pour les Instituts religieux était organisée par Justice et Paix et le Service National Famille et Société de la Conférence des Évêques de France. Elle avait pour thème: « Acteurs en Église contre la traite ». Au programme, deux court-métrages « #Invisibles » et « #Devenir » réalisés par le Collectif « Ensemble contre la traite des êtres humains » présentaient la traite des enfants en France.

Puis, une table ronde, suivie d’un débat  riche, a réuni des associations engagées sur le terrain : le Foyer AFJ géré par les sœurs adoratrices accompagne des femmes victimes de la traite sexuelle ; les Champs de Booz, créé par deux congrégations « Notre Dame de Charité » et « Le Bon Pasteur » et soutenu par une vingtaine d’autres, vient en aide aux femmes seules, demandeuses d’asile, en cours de régularisation et d’insertion, le Réseau RENATE, formé par des religieuses engagées en Europe contre la traite humaine et l’exploitation.

Le 13 février, à 18h, à la Maison des Évêques de France, une soirée grand public organisée par Justice et Paix et « Combattre la traite des êtres humains. Comment ? », aborde, avec le rédacteur en chef de La Croix,  cette question « L’indignation médiatique et la mobilisation citoyenne suffiront-elles à combattre la traite des êtres humains ?».

 

Le pape François conçoit le désarmement nucléaire comme une question cruciale pour l’avenir de l’humanité et la sauvegarde de la création.

Face aux atrocités de la première guerre mondiale, le pape Benoît XV adresse le 1er août 1917 une lettre aux chefs d’État des peuples belligérants, [… et] propose un arbitrage international.

Cette posture médiane lui vaudra le surnom de « pontife du Saint-Empire » pour les uns, et de « pape français » pour les autres ». Cette journée entendait « replacer cette lettre dans le contexte du Rhin supérieur. Avec cette destinée commune, se dégagent des itinéraires singuliers qui conduiront à la paix, la réconciliation et la fraternité, après l’Armistice du 11 novembre 1918, vécu comme une véritable libération. Un véritable laboratoire d’une Europe en devenir  ».

Extraits de la lettre de Benoît XV

« Dès le début de Notre Pontificat, au milieu des horreurs de la terrible guerre déchaînée sur l’Europe, Nous Nous sommes proposé trois choses entre toutes : (a) garder une parfaite impartialité à l’égard de tous les belligérants… (b) Nous efforcer continuellement de faire à tous le plus de bien possible, et cela sans acception de personnes, sans distinction de nationalité ou de religion… enfin… (c) amener les peuples et leurs chefs… aux délibérations sereines de la paix… Nous n’avons pas cessé non plus d’exhorter peuples et gouvernements belligérants à redevenir frères… L’Europe… va-t-elle donc… prêter la main à son propre suicide ? Nous jetons de nouveau un cri de paix… Nous voulons maintenant descendre à des propositions plus concrètes… se mettre d’accord sur les points suivants, qui semblent devoir être les bases d’une paix juste et durable  […].

Tout d’abord le point fondamental doit être qu’à la force matérielle des armes soit substituée la force morale du droit ; d’où un juste accord de tous pour la diminution simultanée et réciproque des armements… puis, en substitution des armées, l’institution de l’arbitrage, … selon des normes à concerter et des sanctions à déterminer… Que l’on enlève tout obstacle aux voies de communication des peuples, en assurant… la vraie liberté et communauté des mers, ce qui… éliminerait de multiples causes de conflit, et… ouvrirait à tous de nouvelles sources de prospérité et de progrès.

Quant aux dommages à réparer… principe général : une remise entière et réciproque, justifiée… par les bienfaits immenses à retirer du désarmement… la restitution réciproque des territoires actuellement occupés. Pour ce qui regarde les questions territoriales, … les examiner avec des dispositions conciliantes, tenant compte, dans la mesure du juste et du possible, … des aspirations des peuples, et… coordonnant les intérêts particuliers au bien général de la grande société humaine. Fasse le Ciel que… vous vous assuriez aussi, auprès des générations futures, le beau nom de pacificateurs ».

« La paix française » ou non possumus !

Le 10 décembre 1917, en l’église de la Madeleine, le Père Sertillanges prononçait un sermon célèbre, devant l’archevêque de Paris et un parterre de personnalités, dont voici des extraits :

« La victoire… n’est destinée qu’à obtenir une juste et glorieuse paix… Nous n’avons pas confiance en la bonne foi teutonne…  C’est pourquoi, unanimement,… nous nous tournons vers ce trône de justice élevé au-dessus des nations, et, après l’avoir salué, après nous être unis à ses hautes intentions pacifiques dont nous fûmes et demeurons entièrement d’accord … nous disons : Très Saint Père, nous ne pouvons pas (non possumus) pour l’instant, retenir vos appels à la paix … ne croyant pas à une paix de conciliation, nous nous sommes engagés à réaliser une paix différente, une paix française … Ce ne sera pas la paix des diplomates, ni la paix de Stockholm, ni la paix des Soviets, ni la paix illusoire, quoique sincère, de nos socialistes ; ce ne sera pas même, – nous le regrettons de toute notre âme -,  la paix par une paternité s’élançant au-dessus des deux camps : ce sera la paix par la guerre  âpre et menée jusqu’à terme, la paix de la puissance juste brisant la violence, la paix du soldat ! … et pour la victoire, tout, jusqu’au bout ».

La journée d’étude

Il est révélateur que les monuments aux morts d’Alsace et Moselle portent les mots « morts à la guerre », et non « morts pour la France » ! Une fois resitué le pontificat de Benoît XV (L. Perrin), la réception de son appel fut examinée pour le diocèse de Strasbourg (C. Muller) et au pays de Bade (B. Henze). Et de découvrir, par exemple, l’art de gouverner de l’évêque allemand de Strasbourg, Mgr Fritzen, obligé de relayer la conception de l’État allemand – l’alliance du trône et de l’autel – mais jouant de sa liberté dans ses mandements de carême pour adopter alors un ton catholique et non allemand. Clergé et laïcs sont fracturés entre germanophiles et francophiles. En quoi la lettre du Pape a-t-elle participé à la construction d’un nouveau droit international (A. Zardi) ? Ou rejoint-elle les programmes de paix de M.J. Metzger (F. Wintermantel), ou de G. Fessard (D. Coatanea) ? Quid de la guerre, de la paix et de la fraternité dans la pensée sociale chrétienne (M. Feix) ? Et le général E. de Hautecloque-Raysz d’examiner si l’Europe, construite pour la paix, doit préparer la guerre …