Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

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Le récent mouvement social des surveillants pénitentiaires nous a rappelé la difficulté de cette profession qui peine à recruter et le paradoxe de prisons où la société voudrait toujours plus de places, tout en ignorant ce qui s’y passe.

 

La prison concentre toutes les contradictions de notre société. Les surveillants, qui se situent en bout de chaîne, sont confrontés dans les coursives à l’absurdité de la sanction, dont le manque de moyens affaiblit le sens. L’inscription de l’individualisation du sens de la peine dans la loi pénitentiaire ne suffit pas à en faire une réalité.

 

Image paradoxale

J’entends souvent des personnes étrangères à l’univers carcéral utiliser le terme de « maton » pour désigner les surveillants, comme si l’argot de films policiers définissait la profession dans l’imaginaire collectif. Pire, les jeunes détenus disent « SS » quand ils en parlent, terme particulièrement violent, que seule l’ignorance peut expliquer sinon excuser.

Paradoxe que cette image mal-aimée d’agents du service public, confrontés au quotidien à la perte de l’autorité, à l’exacerbation de la violence, à une population souvent déstructurée et atteinte de troubles psychiatriques. Une directrice disait que « la prison est un accélérateur de la maladie mentale ».

Souvent, des détenus sans trouble psychologique doivent prendre des médicaments pour supporter l’enfermement. Que dire de ceux qui sont déjà fragiles ou perturbés avant l’incarcération ? Le sous-effectif accroît les difficultés de la gestion de la détention : trop souvent un seul surveillant doit gérer une coursive, là où les normes en imposent deux, problème régulièrement pointé par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté lors de ses visites.

 

Démission

Certains surveillants n’osent pas dire à l’extérieur le métier qu’ils font, d’autres tentent dès que possible de changer d’administration. Une étude de 2011, réalisée par l’École Nationale de l’Administration Pénitentiaire relative au taux de démission des surveillants sur 11 promotions, faisait état d’un taux moyen de 6,1% d’abandons au bout d’un an de titularisation, les régions les plus touchées étant Paris, Lyon et Dijon. Et si la presse rapportait, lors des récents événements, les difficultés de recrutement et des cas d’absentéisme importants au concours, paradoxalement l’écho donné à ce mouvement social ne suscitera guère l’envie de jeunes d’embrasser la carrière.

 

Un beau métier : veiller

Pourtant, je constate, en tant qu’aumônier, qu’être surveillant peut être un beau métier. Lorsqu’il y a quelques années je commençais ma mission, je me souviens d’une visite à un détenu assez tendu qui, avec le peu de moyens dont il disposait, venait de renverser son dernier café, en essayant de verser l’eau d’une poêle dans un gobelet en plastique. Il s’inquiétait de savoir si de l’argent était arrivé sur son pécule à sec.

L’aumônier qui m’accompagnait a sollicité le surveillant pour lui demander s’il pouvait le renseigner sur l’état de son pécule, lui expliquant au passage l’incident du café. Le surveillant, qui faisait le ramadan, a regardé le pécule, en a inscrit le montant sur un papier qu’il est allé porter au détenu avec un café en allant refermer la cellule.

Tous les préjugés que je pouvais avoir sont tombés et j’ai découvert qu’avec cette profession, il s’agit d’abord de contacts humains et que la qualité de l’homme fait la réalité du métier. « Surveillant », c’est « celui qui veille sur » ; même étymologie qu’épiscope. Depuis, j’ai rencontré beaucoup de surveillants qui font honneur à la profession et essaient de leur mieux d’apaiser les tensions plutôt que de les attiser.

Bien sûr, il en est aussi qui se voient plutôt du côté de la peine que du souci d’y mettre du sens, et nous rencontrons de leur part un accueil, sinon hostile, du moins peu favorable. Mais cela reste marginal d’après ma petite expérience.

 

Attentes contradictoires ? Faire autrement

Des agressions ont toujours existé même si la question des détenus radicalisés pose des questions nouvelles. Mais c’est l’accumulation de tensions et de malaise qui a conduit à faire déborder le vase, à un moment choisi, puisque c’est l’année d’élections professionnelles. Le malaise des surveillants est surtout un symptôme de la maladie de la prison, trop négligée pendant trop longtemps et trop sollicitée en même temps.

On voudrait toujours plus de prisons, sans bien savoir pour quoi faire ; on les voudrait toujours plus sécurisées, quand bien même une part importante de la population carcérale ne le justifie pas ; on y voudrait toujours plus de monde, avec toujours moins de personnel, rapporté au nombre de détenus. Dans ces conditions l’individualisation du sens de la peine risque de rester un vœu pieux, le taux de récidive important et le malaise des surveillants persistant.

Pourtant, il n’est qu’à regarder vers nos voisins du nord de l’Europe ou vers le Canada pour constater qu’on peut faire autrement. Lors d’échanges informels, des membres du personnel de surveillance ou des officiers l’observent eux-mêmes. Mais pour que les décideurs prennent mieux en compte la réalité de la prison et remédient aux difficultés, il faudrait commencer par écouter tous ceux qui y vivent ou y passent le plus clair de leur temps.

 

 

Avec ses 266.000 km², la moitié de la France métropolitaine, le Sahara occidental (SO) est bordé par l’Atlantique et les Canaries espagnoles à l’ouest, le Maroc au nord, l’Algérie au nord-est et la Mauritanie à l’est et au sud.

 

Au deuxième millénaire avant Jésus Christ, la savane s’est désertifiée. Au premier millénaire, le territoire est investi par des tribus berbères nomades sanhadjas. Au cours du 5ème siècle, le navigateur Carthaginois Hannon aurait établi un comptoir sur l’île de Kerné[1], peut-être dans la baie de Dahkla. Longtemps, cet espace n’a pas été organisé, ni « vécu », comme un État-nation.

Vers 1050, des Berbères sanhadjas fondent le mouvement almoravide, qui unifie les tribus du SO, entre 1042 et 1052, puis les émirats de l’actuel Maroc et Al-Andalus (majeure partie de l’Espagne). Sous les Almohades (1147), la cohésion du SO se délite.

Avec la bulle Inter Coetera (4 mai 1493), le pape Alexandre VI donne à l’Espagne les terres à l’ouest des Açores et du Cap-Vert, au Portugal celles à l’est, afin de « soumettre et convertir à la foi catholique  … leurs habitants et indigènes » (art. 5-6). Toutefois, en 1502, le Pape concède aux Espagnols une enclave à l’est, la future Villa Cisneros (SO). A partir de 1514, l’influence marocaine des Saadiens se fait sentir ; cette dynastie gouverne le Maroc (1554-1659), suivie, à partir de 1674, de celle des Alaouites, celle de l’actuel roi du Maroc.

Sur la côte du SO, des forts portugais et espagnols sont implantés (15e-16e siècles). Le 4 août 1578, lors de la bataille des trois rois, le jeune roi portugais Sébastien 1er, qui souhaitait conquérir le Maroc, meurt ; son royaume passe à l’Espagne jusqu’en 1642. Le Portugal sort du jeu régional.

Au 18ème siècle, des Espagnols des Canaries pêchent au large du SO, la ressource étant abondante. En 1881, la Sociedad Pesquerías Canario-Africanas implante un débarcadère, à l’emplacement de la future « Villa Cisneros ». En 1884, des chefs sahraouis cèdent à l’Espagne la péninsule de Río de Oro.

Nationalisme marocain et Espagne franquiste

La conférence de Berlin (15.11.1884 – 26.02.1885) réunit des pays européens, la Russie, les États-Unis et l’Empire ottoman ; elle organise le partage et la colonisation de l’Afrique, une œuvre de « civilisation », interdit l’esclavage et la « traite négrière », affirme la liberté religieuse, protège voyageurs et missionnaires. Elle définit des sphères d’influence.

Le 28 novembre 1884, sont établis les comptoirs de Villa Cisneros[2]/Dahkla et Puerto Badía/Angra da Cintra. Le 26 décembre, l’Espagne proclame protectorat le Rio de Oro ; la conférence de Berlin entérine. Le 6 avril 1887, le protectorat espagnol s’augmente, au nord, de la Seguia el-Hamra, pour former, en 1924, le Sahara espagnol[3]. En 1938, la découverte d’une nappe phréatique permet de créer la ville d’El Aaiún / Laâyoune.

Face à la montée du nationalisme marocain, l’Espagne franquiste regroupe Sahara espagnol et enclave d’Ifni, investie en 1934, pour former l’África Occidental Española (1946-1958). Il n’y a jamais eu plus de 15.000 colons espagnols ; surtout citadins, ils s’investissent dans la pêche, le commerce, l’armée, l’administration coloniale. Les Sahraouis conservent leur justice (droit musulman et coutumier) ; certains se sédentarisent dans les années 1950, à la suite de sécheresses. En 1962, d’immenses gisements de phosphates sont découverts à Boukraâ, près de Laâyoune ; ils sont exploités à partir de 1972. Le plus long convoyeur du monde (96 km) achemine le minerai jusqu’à l’Atlantique.

Indépendance marocaine

Le 2 mars 1956, le Maroc devient indépendant ; le parti de l’indépendance Istiqlal considère le SO comme marocain (25.11.1956). Le  1er juillet 1957, Moktar Ould Dadah déclare : « Nous nous réclamons de cette même civilisation de désert dont nous sommes si justement fiers. Je convie donc nos frères du Sahara espagnol à songer à cette grande Mauritanie économique et spirituelle » ; il devient président de la Mauritanie indépendante (28.11.1960). L’Organisation des Nations Unies (ONU) et celle des États Africains (OUA) respectent le principe de l’intangibilité des frontières[4], même issues de la colonisation (21.07.1964).

En 1957-1958, le Maroc attaque les troupes espagnoles [guerre d’Ifni], mais est stoppé par des troupes franco-espagnoles. Avec les accords d’Angra de Cintra (02.04.1958), le Maroc obtient la région de Tarfaya. L’Afrique Occidentale espagnole est dissoute : l’Espagne conserve Sidi Ifni et le Sahara espagnol, réparti en deux provinces : Río de Oro et Saguia el-Hamra. Laâyoune devient capitale du Sahara espagnol (19.04.1961). En 1963, l’Istiqlal publie une carte du « Grand Maroc » incluant une partie de l’Algérie et du Mali, la Mauritanie et le SO. Un temps, des conflits portant sur le tracé des frontières opposent Maroc et Algérie (guerre des sables, 1963), Maroc et Mauritanie.

 

Le recours à l’ONU

A la demande du Maroc, le SO est placé sur la liste des territoires non autonomes, i.e. non encore décolonisés (au sens du ch. 12 de la Charte des Nations Unies, 16 juin 1945). Le Maroc estime, en effet, qu’un référendum d’autodétermination verrait les Sahraouis demander leur rattachement au Maroc. Le 16 décembre 1965, « considérant … le désir ardent de la communauté internationale de mettre fin au colonialisme partout et sous toutes ses formes … l’Assemblée générale [de l’ONU] … prie instamment le Gouvernement espagnol, en tant que puissance administrante, de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour la libération de la domination coloniale des territoires d’Ifni et du Sahara espagnol et d’engager à cette fin des négociations sur les problèmes relatifs à la souveraineté que posent ces deux territoires » (résolution 2072).

L’Espagne abandonne alors Ifni, mais conserve le Sahara espagnol, sans mettre en œuvre aucune des sept résolutions de l’ONU en faveur d’un référendum d’autodétermination (1966-1973). Parmi divers mouvements indépendantistes, le 10 mai 1973 est fondé le Front Polisario[5], opposé à l’Espagne, au Maroc et à la Mauritanie.

À la demande de l’AG de l’ONU, la Cour Internationale de Justice rend un avis consultatif le 16 octobre 1975 : le SO n’était pas un territoire sans maître, une terra nullius, au moment de la colonisation par l’Espagne. Elle précise :

« Les éléments et renseignements portés à la connaissance de la Cour montrent l’existence, au moment de la colonisation espagnole, de liens juridiques d’allégeance entre le sultan du Maroc et certaines des tribus vivant sur le territoire du Sahara occidental. Ils montrent également l’existence de droits, y compris certains droits relatifs à la terre, qui constituaient des liens juridiques entre l’ensemble mauritanien, au sens où la Cour l’entend, et le territoire du Sahara occidental.

En revanche, la Cour conclut que les éléments et renseignements portés à sa connaissance n’établissent l’existence d’aucun lien de souveraineté territoriale entre le territoire du Sahara occidental d’une part, le Royaume du Maroc ou l’ensemble mauritanien d’autre part. La Cour n’a donc pas constaté l’existence de liens juridiques de nature à modifier l’application de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale des Nations Unies quant à la décolonisation du Sahara occidental et en particulier l’application du principe d’autodétermination grâce à l’expression libre et authentique de la volonté des populations du territoire ».

Le roi Hassan II organise une marche verte et investit le territoire du SO (6 novembre 1975) ; Franco autorise le retrait de l’Espagne (il décède le 20.11.1975) ; avec les accords de Madrid (14.11.1975), le Maroc obtient les deux tiers nord du Sahara espagnol, et la Mauritanie le tiers sud. Ni les Sahraouis, ni l’Algérie, ni l’ONU n’ont pris part à ces accords. Au départ du dernier soldat espagnol, le 27 février 1976, le Front Polisario proclame la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD), soutenu par l’Algérie, et mène une lutte armée. Beaucoup de Sahraouis se réfugient à Tindouf en Algérie. La compagnie espagnole Phosboucraâ est reprise par le Maroc (65% en 1976, et 35% en 2002). Le 10 août 1979, la Mauritanie cède son tiers du SO à la RASD, aussitôt annexé par le Maroc.

De 1980 à 1987, le Maroc érige le Mur des Sables le plus long mur du monde (2.720 km), avec aide israélienne et financement saoudien : entre 200.000 et 10 millions de mines antipersonnel (35 types) et antichar (21 types) ont été implantées (chiffres ONU). Le Maroc contrôle 80 % du territoire, à l’ouest du mur, le Front Polisario, 20%, à l’est. Le 30 août 1988, Maroc et Front Polisario acceptent le règlement proposé par l’ONU et l’OUA : un référendum sur la base du recensement espagnol des Sahraouis de 1974. Le SO demeure territoire non autonome, sans puissance administrante reconnue.

Une autonomie relative

Le 29 avril 1991, un représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU est chargé d’organiser le référendum, aidé de la MINURSO[6], pour janvier 1992. Le referendum a été sans cesse reporté, faute d’accord entre les parties sur les listes électorales (populations nomades, mal identifiées). Le Maroc se présente maintenant comme facteur de stabilité : opinion publique « unanime », rempart contre le terrorisme ; il a proposé un statut d’autonomie pour le SO, sous souveraineté marocaine (soutenu par divers pays, dont le Président Sarkozy le 23.10.2007). La résolution 2351 du 28 avril 2017 maintient la nécessité du référendum (n°11) et proroge le mandat de la MINURSO jusqu’au 30 avril 2018.

En mai 2006, un rapport du Haut-Commissariat de l’ONU aux Droits de l’Homme a critiqué le manque des droits les plus élémentaires dans le SO. Amnesty International a publié le rapport intitulé L’ombre de l’impunité. La torture au Maroc et au Sahara occidental, en 2015. Le Comité de l’ONU contre la torture a condamné le Maroc le 12 décembre 2016. Le 27 Janvier 2018, l’ACAT a remis le prix Engel-du Tertre des droits de l’homme à Naâma Asfari, militant sahraoui, torturé, battu et condamné injustement par le Maroc à 30 ans d’emprisonnement (La Croix, 26.01.2018).

 

[1] Périple de Hannon, 8b.10.

[2]  En hommage au cardinal éponyme (1436-1517). Villa Cisneros sera une escale aérienne entre France et Sénégal, à partir de 1918, pour Latécoère, puis l’Aéropostale : Mermoz, Saint-Exupéry, Guillaumet…..

[3] La frontière au sud, avec la Mauritanie (alors française) a été fixée par le traité de Paris (27 juin 1900), sans tenir compte des populations. Au nord, elle l’est par la convention de Paris (4 octobre 1904) ; le Maroc devient protectorat français (traité de Fez, 30 mars 1912), sans spécification de durée. La Convention de Madrid (27.11.1912) met « en harmonie les intérêts [de la France et de l’Espagne] au Maroc », définissant une zone d’influence espagnole au Maroc.

[4] Uti possidetis, ita possideatis : comme vous possédez, qu’ainsi vous possédiez.

[5] Frente POpular de LIberacíon de SAguía-el-Hamra y RIo de Oro.

[6] MIssion des Nations Unies pour l’organisation d’un Référendum au Sahara Occidental.

Les Secrétaires généraux de vingt-cinq commissions Justice et Paix européennes se sont réunis – comme chaque année – en février 2018, cette fois à Belfast, en Irlande du Nord.

 

Brexit : danger en Irlande du Nord

 « Une frontière dure ferait beaucoup de mal ». Tel fut le message. Les discussions avec des militants de la paix, des responsables de l’Église et des dirigeants politiques concernèrent l’impact potentiel du Brexit sur l’Accord de paix du Vendredi Saint de 1998. Parmi les interlocuteurs et intervenants, notons l’universitaire nord-irlandaise et ancienne politicienne Monica McWilliams, le ministre presbytérien Dr. Ken Newell, l’historien Dr. Eamon Phoenix, la supérieure des Sœurs de l’Adoration à Belfast Mère Mary Joséphine, Ed Petersen de la Mission Clonard Paix et Réconciliation et Mgr Noel Treanor du diocèse de Down et Connor.

L’ancien maire de Belfast et membre de l’Assemblée d’Irlande du Nord, Alban Maginness, prononça un discours liminaire. Il expliqua la pertinence de l’important accord du Vendredi Saint de 1998 sur le processus de paix en Irlande du Nord. Il contient des dispositions relatives au statut de l’Irlande du Nord au sein du Royaume-Uni, aux relations entre le Royaume-Uni et la République d’Irlande et aux relations entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande. Inspiré par le processus d’intégration européenne, cet accord fut conçu sur la base suivante : la République d’Irlande et le Royaume-Uni, comme membres de l’Union européenne.

« Des négociations soutenues aboutissent à la signature d’un accord de paix visant à stabiliser la situation politique en Irlande du Nord. L’élection du travailliste Tony Blair (Royaume-Uni) et celle de Bertie Ahern du Fianna Fail (République d’Irlande), en 1997, pavent la voie pour une reprise des négociations sur la question de l’Irlande du Nord. Elles aboutissent le 10 avril 1998 à un accord de paix signé à Belfast. L’Irlande du Nord demeure britannique, mais une assemblée locale semi-autonome sera élue et un conseil de coopération sera mis sur pied entre les Irlandais du sud et ceux du nord.

Ces derniers se voient garantir qu’aucun changement constitutionnel ne sera adopté sans leur consentement alors que la République d’Irlande s’engage à abroger les articles de sa Constitution affirmant sa souveraineté sur l’ensemble de l’île ».[1] L’accord sera approuvé par deux référendums : OUI à 74 % en Irlande du Nord, OUI à 94 % en République d’Irlande.

Avec le Brexit, cet équilibre risque de se rompre. Le retour d’une frontière dure entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord serait particulièrement préjudiciable à l’économie et à la stabilité politique en Irlande du Nord. Cela constituerait un risque sérieux pour la paix et la réconciliation et pourrait accroître le niveau de violence entre les communautés. Une solution précise, claire et non ambiguë pour éviter une frontière dure est donc nécessaire. On comprend les soucis de l’Union européenne et de son négociateur Michel Barnier pour trouver avec Londres, Dublin et même Belfast une solution qui aujourd’hui n’apparaît pas clairement.

 

Nord de la Syrie : danger turc

 Les Secrétaires généraux ont par ailleurs étudié la situation en Turquie car l’action militaire de ce pays en Syrie du Nord est contraire au droit international. Justice et Paix Europe appelle par un communiqué de presse à la fin immédiate de l’invasion turque de la Syrie qui frappe l’une des dernières régions intactes du pays. À Afrin, depuis que la guerre civile syrienne a éclaté en 2011, des centaines de milliers de personnes déplacées ont été accueillies sans distinction d’ethnie ou de religion. L’attaque des forces militaires turques, avec le soutien de certains groupes musulmans radicaux, est une violation du droit international. Elle a eu des conséquences dramatiques sur l’ensemble de la région, où diverses minorités ethniques et religieuses sont maintenant menacées. Beaucoup de victimes civiles ainsi que des dévastations massives, sont à déplorer.

Le pape François, qui a reçu une délégation de Yézidis à Rome, a rencontré le président Erdogan le 6 février dernier. À l’occasion de cette audience, il lui a fait cadeau d’une médaille portant un ange de la paix. « C’est un ange de paix qui vainc le démon de la guerre et symbolise un monde basé sur la paix et la justice », a expliqué François.

Face aux pertes civiles à Afrin, Justice et Paix Europe exprime sa solidarité et soutient les demandes des habitants menacés et affectés : établissement d’une zone d’exclusion aérienne, et cessez-le-feu immédiats, création de couloirs humanitaires pour les secours et les médicaments, action diplomatique de l’Union européenne et de ses États membres vis-à-vis de la Turquie, solution négociée au conflit, accès d’observateurs internationaux à la région.

La politique européenne exige, dès lors, une position claire sur la Turquie et une condamnation de cette invasion militaire frappant la population civile. Son extension est plus qu’une hypothèse. L’action s’impose donc.