Pour les Mélanésiens qui l’habitent depuis des millénaires, c’est le Kanaky.

Pour les français de métropole, c’est un territoire d’outre-mer, avec son statut particulier qui lui accorde beaucoup d’autonomie. Mais c’est aussi, et en particulier pour les dirigeants français, un des signes de la grande puissance française dans le monde.

Pour des raisons aujourd’hui essentiellement géopolitiques (garder la Chine à distance et posséder des eaux territoriales immenses), les autorités semblent vouloir en faire un territoire définitivement partie intégrante de la France. Les Mélanésiens s’opposent à cette vision qui les éloigne de leur souveraineté.

Le projet de réforme électorale a rallumé les braises d’un conflit refoulé. Et le transfert et l’incarcération en métropole de leaders indépendantistes plus radicaux ne peuvent manquer de rappeler ceux du général haïtien Toussaint Louverture emprisonné au fort de Vaux ou en sens inverse ceux de militants kabyles réclamant l’indépendance et envoyés en Nouvelle Calédonie.

On peut craindre d’y voir le signe d’une résurgence coloniale. L’avenir du Kanaky peut encore être pensé de manière harmonieuse entre les leaders mélanésiens traditionnels et la puissance coloniale pour un pays souverain associé à la France.

Encore faut-il commencer à écrire cette nouvelle page.

Télécharger la Lettre n°304 septembre 2024  (PDF)   

Au moment où se terminait le 20e Congrès du Parti Communiste Chinois, qui confirmait la ligne politique dure « à la Mao » du leader suprême Xi, le Saint-Siège renouvelait l’accord provisoire avec la République Populaire de Chine sur la nomination des évêques, et le cardinal Joseph Zen était convoqué au tribunal pour son soutien au mouvement prodémocratie de Hong Kong.

Cette concomitance d’événements a fait de ce mois d’octobre un moment marquant de l’histoire de l’Église catholique en Chine. Dans ce pays de 1,4 milliard d’habitants, le plus peuplé de la planète avec l’Inde voisine, et qui fait de l’athéisme la religion officielle, on compte pour autant encore 362 millions de croyants, principalement bouddhistes, chrétiens, musulmans, taoïstes. Leur vie de foi est devenue difficile, tant la pression est forte pour qu’ils l’abandonnent. La voie choisie par le Parti est de « siniser » les religions, c’est-à-dire d’en faire des expressions au service de la pensée Xi Jinping. Ce dernier a insisté pour que les religions se « conforment mieux » aux « réalités chinoises » et à la « société socialiste ». Le Congrès national des catholiques de Chine du mois d’août dernier a ainsi très officiellement réaffirmé la primauté du patriotisme et du socialisme. L’Église doit être un instrument de l’État et soutenir le Parti. Cette ligne de toujours a été réaffirmée avec force depuis 2017. Les chrétiens, qu’ils soient protestants pour la majorité d’entre eux (environ 70 millions) ou catholiques (12 millions) ont la chance d’appartenir à une communauté de croyants universelle, qui les rattache à des frères et sœurs de partout. Ils se savent soutenus et entourés. Cela leur donne une force que les croyants bouddhistes ou taoïstes n’ont pas.

La persécution est sournoise mais réelle. C’est ainsi que les enfants et les jeunes n’ont pas le droit d’entrer dans les églises pour les offices. Si dans les années 80, on a reconstruit des églises, aujourd’hui il faut l’autorisation des autorités locales, de plus en plus difficile à obtenir, et si on ne la demande pas, l’église sera détruite. Dans certains endroits, les enfants sont utilisés comme espions contre leurs parents. Une pression est exercée sur les familles chrétiennes avec des menaces sur les études de leurs enfants. En janvier dernier, 5 chrétiens ont été condamnés à une peine de 6 à 8 mois de prison pour avoir participé à une conférence chrétienne internationale. À partir du 1er mars, les chrétiens de Chine n’ont plus le droit de diffuser du contenu religieux sur internet sans autorisation. Les camps pour les jeunes sont interdits. Des évêques de l’Église non officielle, comme Mgr Joseph Zhang Weizhu de Xinxiang, ont été arrêtés et emprisonnés sans que l’on sache où ils sont.

La liste des brimades et persécutions est longue, l’espace de vie de l’Église ne cesse de se rétrécir. C’est clairement la transmission de la foi qui est visée. Cela rappelle la Révolution culturelle des années 66-76.

Pour autant, la persécution n’arrive pas à museler et bannir la pratique des croyants. Au contraire, elle est source d’inventivité. Les maisons et les appartements sont devenus les lieux de la catéchèse, de la prière commune, parfois de célébrations liturgiques comme le baptême ou la messe. « Chaque famille continue de célébrer sa foi à la maison et reste proche de Dieu. Peu importe le niveau de persécution, cela ne pourra jamais l’emporter sur notre foi dans le Seigneur. »

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Statue de saint François-Xavier devant la cathédrale de l’Immaculée-Conception  de Pékin

Le Saint-Siège avait mis de l’espoir dans l’accord provisoire qu’il avait signé avec la RPC, le voyant comme une porte qui s’ouvrait sur l’essentiel : la communion pleine et entière des évêques avec le Saint Père à travers le choix et la nomination des évêques, sur la proposition de l’Association Patriotique des Catholiques Chinois, organisation liée au Parti Communiste. En réalité, peu a été fait : en 5 ans, 6 nouveaux évêques ont été nommés dans une liste soumise au pape et 6 évêques patriotiques ont été reconnus par le pape, ce qui a parfois exigé le retrait d’évêques clandestins de leur mission. Le nombre de diocèses vacants reste important, et l’accord n’a pas vraiment permis de retour à l’unité avec les persécutions qui se sont multipliées.

Le procès du cardinal Zen s’est ouvert ce 26 octobre 2022. Il lui est reproché d’avoir aidé à la constitution d’un fonds de soutien aux manifestants de 2019. Né à Shanghai il y a 90 ans, il a toujours défendu la démocratie à Hong Kong. Son procès est symbolique de ce que l’Église de Chine est en train de vivre : face aux exigences de la vie de foi qui promeut l’engagement pour l’avènement d’une société juste et fraternelle, et quelles que soient les circonstances et les persécutions, l’espérance est toujours vive.

 

Notez bien ces dates car ce sont celles des 21 heures de la non-violence : un grand événement en ligne illustrant la diversité des pratiques non-violentes au XXIème siècle. 21 heures de direct pour découvrir en quoi la non-violence est radicale et révolutionnaire, se former, discuter et agir en soutenant les organisations participantes !

Durant 3 fois 7 heures, vous pourrez ainsi découvrir une programmation construite et animée par nos membres et associations partenaires : table-ronde, initiation à la communication non-violente, discussions sur l’intervention civile de paix, moments interactifs et passage à l’action en ligne, interludes artistiques, etc.
La programmation finale est en cours d’élaboration, mais sachez déjà qu’elle s’annonce riche et variée et nous avons hâte de vous la dévoiler.
Techniquement, les 8 et 10 décembre auront lieu intégralement en visioconférence sur Zoom, où nous vous accueillerons dans un cadre familier à celles et ceux qui ont déjà participé à nos télécauseries.

Le vendredi 9 décembre, nous pouvons d’ores et déjà vous annoncer que, grâce à la mise en place d’un partenariat avec le média engagé en ligne Humeco, les 7 heures d’événement seront retransmises en direct sur la plateforme de streaming Twitch ! Depuis un plateau, dans des conditions télévisuelles, nous vous proposerons un contenu sous une forme inédite et ludique qui on l’espère, vous plaira !

Cet événement de fin d’année sera ponctué d’appel à dons, que nous répartirons aux associations participantes afin, toujours, de soutenir la résolution de conflits par la non-violence au XXIè siècle.
Nous espérons vous y voir nombreux.ses et pouvoir compter sur vous pour le relayer afin d’en faire un succès pour la non-violence !Pour ne rien louper des prochaines informations, inscrivez-vous à la newsletter dédiée via le lien suivant: https://bit.ly/3UIqO7C

À l’issue du 20e Congrès du Parti communiste chinois (PCC) en octobre dernier, le sacre de « l’empereur » Xi Jinping pour un troisième mandat de cinq ans ouvre une nouvelle ère d’instabilité où l’idéologie communiste et le nationalisme vont largement déterminer les décisions de la seconde puissance mondiale.

Xi Jinping est devenu le dirigeant le plus puissant de la Chine depuis le « Grand timonier » Mao en son temps. Au terme du très historique 20e Congrès du Parti communiste chinois (PCC) en octobre dernier, le leader Xi Jinping de 69 ans s’est assuré un troisième mandat consécutif à la tête de la Chine. Celui que de nombreux observateurs en Chine et à l’étranger qualifient de « président de tout » a désormais toutes les manettes du pouvoir entre les mains. L’équipe dirigeante, un petit groupe de six personnes appelées « les immortels » a été sélectionnée sur des critères de « loyauté » à Xi Jinping. La « pensée Xi Jinping » est inscrite dans la constitution et le Parti communiste le considère comme « le cœur du pouvoir » envers qui tout le pays doit obéissance, des écoles maternelles aux maisons de retraite. Il ne fait plus aucun doute que Xi Jinping cherche désormais à se maintenir au pouvoir à vie.

Face à un tel pouvoir absolu et un culte de la personnalité jamais vus depuis les années 1950, l’avenir s’annonce encore plus périlleux pour la vie quotidienne, les libertés individuelles et de croyance des Chinois, sur fond de ralentissement économique. À l’étranger, la communauté internationale s’inquiète alors que la guerre en Ukraine déstabilise les équilibres géostratégiques de la planète, et que les tensions avec les États-Unis ne cessent de croître.

Après des décennies de croissance effrénée, le pays fait désormais face à un net ralentissement, accentué par une politique zéro Covid inflexible qui entraîne des confinements à répétition (des dizaines de millions de Chinois sont régulièrement confinés) et pénalise l’activité. Ces difficultés s’ajoutent à celles qui pesaient déjà sur l’économie chinoise : consommation atone, crise de l’immobilier ou encore tour de vis contre les lucratifs secteurs de la tech et du soutien scolaire. Le chômage des jeunes atteint près de 20 %.

Ces difficultés surviennent au moment où les relations entre la Chine et les puissances occidentales se tendent. Reprise en main à Hong Kong, sort de la minorité ouïghoure au Xinjiang (nord-ouest), rivalité technologique avec les États-Unis, guerre en Ukraine…, les différends ne manquent pas. Le monde « subit des changements inédits depuis un siècle », a martelé Xi Jinping à l’ouverture du Congrès du PCC. Le thème de la « sécurité nationale » y a largement surpassé tous les autres, ont relevé des sinologues qui s’inquiètent des priorités chinoises à l’avenir. De fait, le Parti communiste a inscrit pour la première fois dans sa charte une mention sur sa « ferme opposition » à l’indépendance de Taïwan.

« La réunification de la patrie doit être réalisée et sera réalisée » a martelé Xi Jinping au Congrès du Parti communiste chinois. Et il répète depuis des années que l’option militaire n’est pas écartée. Toute invasion chinoise de Taïwan perturberait les chaînes d’approvisionnement mondiales : l’île est le principal fabricant mondial de semi-conducteurs, des composants indispensables à une multitude d’appareils électroniques. Une intervention militaire provoquerait l’indignation des Occidentaux, isolerait la Chine et rapprocherait plus que jamais Pékin et Washington d’une confrontation armée directe. Joe Biden ayant répété que les États-Unis se porteraient au secours de Taïwan en cas d’attaque militaire chinoise.

Pékin considère l’île de 23 millions d’habitants comme partie intégrante de son territoire, bien que Taïwan dispose depuis plus de 70 ans d’un gouvernement propre. Les tensions autour de l’île se sont nettement accentuées avec les États-Unis depuis la visite en août de la numéro trois américaine, Nancy Pelosi. Y voyant une atteinte à sa souveraineté, Pékin avait alors organisé dans la foulée ses plus larges exercices militaires. La reconduction de Xi Jinping « peut être un élément (…) qui augmente le risque de conflit armé » a déclaré, à l’Agence France-Presse, Dan Macklin, analyste établi à Shanghai.

En cas de ralentissement économique prolongé, le Parti communiste pourrait intensifier sa pression sur Taïwan pour renforcer sa légitimité, explique-t-il. Car le PCC tire actuellement sa principale légitimité de l’augmentation du pouvoir d’achat de la population, qui risque d’être mise à mal. Un Xi Jinping vieillissant, entouré d’une équipe à sa solde, augmente par ailleurs « le risque d’erreur de calcul » dans les décisions, prévient l’analyste. Henry Gao, professeur de droit à l’université de gestion de Singapour, prédit quant à lui que Xi Jinping sera « plus conservateur » en politique intérieure mais « plus radical » à l’international lors de son prochain mandat : il « tentera de se confronter à l’Occident ».